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awans-memoire-et-vigilance.over-blog.com

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Site relatif au devoir de mémoire. Concerne la FNC, la FNAPG et la CNPPA pour AWANS, BIERSET. Concerne les combattants, les résistants, les prisonniers, la guerre, l'armistice, la libération. Reportages sur les commémorations, les Monuments aux Morts, la Fête Nationale. Discours 11 novembre, 21 juillet et autres.


Deux rescapés du génocide des Tsiganes: Karl et Ceija STOJKA

Publié le 28 Février 2025, 12:56pm

KARL et CEIJA STOJKA :

Témoins du « Porajmos » ou « Samudaripen »

Le génocide méconnu des tziganes.

KARL STOJKA, le peintre gitan survivant de l'Holocauste a dit :

′′ Ce n'est pas Hitler ou Himmler qui m'ont déporté, m'ont frappé, tué mes proches. C'était le voisin, le laitier, le cordonnier, le médecin, qui ont reçu un uniforme et qui croyaient être la race supérieure."

 

Le génocide des Sintis et des Roms pendant la période nazie est peu connu. Partout en Europe, ils furent arrêtés, déportés et assassinés. Beaucoup furent contraints de travailler dur dans des camps et des ghettos. Des centaines de milliers périrent.

Plus de la moitié des victimes avaient moins de 14 ans.

90 % des Sintis et Roms autrichiens ont péri lors du génocide.

  1. La famille STOJKA.

Les STOJKA était une famille tsigane catholique qui vivait dans un village à l'est de l'Autriche. Ils faisaient partie d’un clan tsigane ( les Lowara Roma ).  Ils se déplaçaient comme des nomades, en roulotte. Ils gagnaient leur vie comme marchands de chevaux itinérants et passaient l'hiver à Vienne. La mère était aussi diseuse de bonne aventure.

Leurs ancêtres avaient vécu en Autriche depuis plus de deux siècles.

Karl STOJKA est né le 20 avril 1931 et sa sœur Ceija, en 1933. Ils étaient six frères et soeurs. Karl était le quatrième.

  1. La famille après l’ anschluss.

Après l'annexion de l'Autriche par les nazis en 1938, les déplacements devinrent de plus en plus difficiles. La famille fut contrainte d'abandonner complètement la vente de chevaux et de déménager dans un quartier ouvrier de Vienne.

Les enfants sont allés à l’école dans cette ville et s’y sont fait rapidement beaucoup d’amis.

Laissons témoigner Karl STOJKA :

« J'ai grandi habitué à la liberté, aux voyages et au dur labeur. En mars 1938, nous avions garé notre roulotte pour l'hiver sur un terrain à Vienne. L'Allemagne a annexé l'Autriche juste avant mon septième anniversaire. Les Allemands nous ont ordonnés de ne pas sortir de notre roulotte. Mes parents l'avaient donc transformé en un chalet de bois mais je n'avais pas l'habitude d'être entouré par des murs en permanence. Mon père et ma soeur aînée ont commencé à travailler à l'usine et je suis entré à l'école. »

  1. 1940 : Le cataclysme.

En 1940, le père fut arrêté par la Gestapo et envoyé au camp de concentration de Dachau. Il n’en revint pas.

Un jour de 1941, Karl et un de ses frères, Mongo, voulurent rendre visite à leurs grands-parents, qui logeaient dans un camp traditionnel rom avec 200 à 300 autres Roms. A leur arrivée, ils découvrirent que tous avaient été déportés. Les grands-parents  furent probablement envoyés dans le ghetto juif de Łódź en Pologne via le « camp de gitans de Lackenbach ». Ils ne revinrent pas.

 

Quelque temps plus tard, leur sœur aînée Kathi fut également arrêtée et déportée à Lackenbach.

En mars 1943, la déportation massive des familles roms et sintis encore en place vers Auschwitz commença.

 

La Gestapo vient chercher Karl àl'école et l'emmène à la caserne Rossauer. Il raconte ce tragique épisode :

« La porte s’ouvrit et le gardien de l’école, le directeur et quelques hommes portant de lourds manteaux de cuir entrèrent : la Gestapo. Nous avons tous dû nous lever et crier ‘’Heil Hitler !’’.  Bien sûr, je les ai rejoints, mais ils ont commencé à chuchoter avec notre professeur qui s’est soudainement tourné vers moi et m’a dit tristement : ‘’ Viens, Karli Stojka, tu dois venir avec eux maintenant !’’ J’ai donc pris mes affaires et en bas, une voiture de police nous attendait, ainsi qu’un camion déjà rempli de gitans . »

Il avait onze ans lorsque les nazis l'ont arrêté et déporté au camp de concentration d'Auschwitz-Birkenau. Il y reçut le matricule Z 5742, tatoué sur son avant-bras gauche. Ce numéro se retrouve dans plusieurs de ses œuvres d'art, en tant que partie de la signature.

 

Laissons à nouveau la parole à Karl STOJKA :

« En 1943, ma famille a été déportée vers le camp Nazi de Birkenau qui comptait des milliers de Tsiganes. Nous étions entourés de fils barbelés. En août 1944, seuls deux mille Tsiganes ont été laissés en vie ; neuf cent dix-huit des nôtres ont été placés dans un convoi à destination de Buchenwald dans le cadre du travail obligatoire. Là-bas, les Allemands ont jugé que deux cents d'entre nous étaient incapables de travailler et nous ont renvoyés à Birkenau. J'étais l'un d'eux ; ils ont pensé que j'étais trop jeune. Mon frère et mon oncle leur ont affirmé que j'avais quatorze ans mais que j'étais nain. J'ai pu rester. Les autres sont repartis et ont été gazés. »

Parmi les prisonniers, ils trouvèrent leur sœur Kathi, déportée à Lackenbach plus d'un an plus tôt. Karl put travailler comme serveur à la cantine des gardes SS. De temps à autre, il put rapporter des restes pour sa famille.

Dans ses tableaux, il thématise sa vie de Rom persécuté.

  1. La survie aux marches de la mort.

De ses cinq frères et sœurs, seuls lui, sa sœur Ceija et son frère Mongo survécurent aux camps de concentration de Bergen-Belsen, Auschwitz, Buchenwald et Flossenbürg et à la marche de la mort qui s'ensuivit.

La famille STOJKA fut séparée. Karl et son frère Mongo sont déportés à Buchenwald , tandis que sa mère et ses sœurs sont d'abord envoyées à Ravensbrück , puis à Bergen-Belsen .

De Buchenwald, Karl et Mongo sont transférés au camp de concentration de Flossenbürg en Bavière, où ils doivent travailler dans une carrière de pierre.

En mars 1945, le camp de Flossenbürg est fermé et les prisonniers sont contraints de se diriger vers le sud à pied, lors de marches de la mort . Il n'y a pas de nourriture et quiconque est trop faible pour marcher est abattu par les gardes SS. Le 24 avril 1945, les gardes SS s'enfuient et les prisonniers sont libérés par les troupes américaines. Au cours de la dernière marche de la mort, 5 000 anciens prisonniers de Flossenbürg meurent d'épuisement ou sont exécutés.

Karl STOJKA fut libéré près de Roetz, en Allemagne, par les troupes américaines, le 24 avril 1945. Lorsqu’il aperçut un char américain, il s’est imaginé que le conducteur du char était Dieu : « Merci, Dieu, que tu sois enfin là, merci, Seigneur Dieu. »

  1. Après la guerre.

Karl et Mongo furent recueillis par une famille de paysans allemands qui les nourrit et les soigna. En 1946, ils apprirent que leur mère et leurs trois sœurs avaient survécu et vivaient à Vienne.

Après 1945, ils ont constaté le manque de reconnaissance des Porajmos en Autriche, l'ignorance de la population concernant cette souffrance et la poursuite de certaines politiques anti-Roms.

    1. KARL SOJKA :

Au cours des décennies suivantes, Karl travailla comme marchand de tapis et vécut en Italie, au Portugal et aux États-Unis. En 1985, il revint en Autriche et commença une brillante carrière de peintre. Dans ses tableaux, il dépeignit ses expériences traumatisantes dans les camps de concentration.

Karl s'engagea activement pour la reconnaissance des Roms et Sintis autrichiens comme minorité nationale et pour la reconnaissance et la commémoration du génocide des Roms et Sintis de 1938 à 1945.

Karl STOJKA mourut à l'âge de 72 ans en avril 2003.

5.2. CEIJA STOJKA

Ceija STOJKA a commencé à peindre en 1989, à l’âge de 56 ans. Ses œuvres ont été exposées en Europe de l’Ouest et de l’Est ainsi qu’au Japon. En 2005, le Musée juif de Vienne a organisé une exposition intitulée « Ceija Stojka, Leben ! ».

Bien que tous deux soient célèbres en Autriche, c'est surtout l'art de Ceija qui a suscité une reconnaissance internationale. Les peintures de Ceija reflètent la tristesse ancrée dans le corps et l'esprit des victimes. Il existe plusieurs livres, films et œuvres artistiques qui retracent sa vie.

Ceija a publié son premier livre autobiographique en 1988, « Nous vivons dans l'isolement. Les souvenirs d'une Romni ». Plus tard, en 1992, elle a publié un autre livre autobiographique intitulé : « Reisende auf dieser Welt » / « Voyageurs sur ce monde ».

Ceija STOJKA est décédée le 28 janvier 2013.

Peintures de Karl STOJKA

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Peintures de Ceija STOJKA

 

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