STUTTHOF :
UN CAMP DE CONCENTRATION SOUVENT IGNORE !
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Le camp de STUTTHOF ne doit pas être confondu avec le camp de concentration de Struthof-Natzweiler qui est situé en Alsace.
Stutthof ( Sztutowo en polonais ) est l'un des moins connus des nombreux camps de concentration établis entre l’arrivée au pouvoir en 1933 des nazis et la fin de la seconde guerre mondiale.
1. Emplacement.
En septembre 1939, les Allemands choisirent un emplacement dans une région boisée à l’ouest de Stutthof (Sztutowo), ville située à 35 kilomètres de Dantzig (Gdansk), à 2 km de la Mer Baltique.
La zone était isolée : au nord, la baie de Dantzig, à l’est, la baie de la Vistule, et à l’ouest le fleuve de la Vistule. Se trouvant au niveau de la mer, le sol de tourbe est marécageux.
Entouré par les eaux de la Vistule et de la mer Baltique, le camp était situé dans un endroit retiré, humide, boisé et insalubre.
Le climat étant à la fois maritime et continental, le froid, le vent glacial et la pluie y règnent pendant la plus grande partie de l'année.
2. Origine.
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Pour comprendre l’origine de ce camp, il faut connaître la situation de la ville de Dantzig ( Gdańsk ).
Le Traité de Versailles avait pris plusieurs dispositions réglant ( ou croyant régler ) le sort de la région :
* la Pologne est déclarée indépendante et instituée en République ;
* la Prusse orientale est démantelée ;
* à partir de 1920, Dantzig devient une ville libre (Freie Stadt Danzig) sous la supervision de la Société des Nations, ville-région allemande mais ne faisant pas partie de l’Allemagne.
Environ 95 % de la population de Dantzig parlait allemand. Le NSDAP y décroche la majorité absolue en 1933.
L’établissement du camp à cet endroit était déjà prévu avant l’invasion de la Pologne. Sa construction, à 34 km de Dantzig, débuta en août 1939 et prit fin le 2 septembre 1939 pour accueillir ses premiers prisonniers : 150 civils et prisonniers de guerre polonais. En effet, les nazis considéraient les Polonais comme des « sous-hommes », qui devaient être exterminés afin de germaniser la région.
Les autorités nazies de Dantzig avaient commencé à rassembler des données sur l'intelligentsia polonaise à partir de 1936. Elles avaient déjà recherché les emplacements possibles pour des camps de concentration. À l'origine, le Stutthoff était un camp d'internement civil sous l'autorité du chef de la police de Dantzig.
3. Historique.
Initialement, le camp de Stutthof avait été construit pour persécuter et éliminer les Polonais. Il s’inscrivait dans le cadre de l’épuration ethnique prévue dans la région de Danzig et en Prusse occidentale.
L'éloignement de toute habitation assure la discrétion, et les évasions éventuelles, difficiles. Pour atteindre Dantzig, il faut traverser la Vistule et la Nogat, étroitement gardées. Et Dantzig est acquise aux nazis.
Terminé le 2 septembre 1939, le camp comptait déjà, le 15 septembre, 6000 détenus: des prisonniers de guerre polonais ainsi que de nombreux membres de l'intelligentsia polonaise dont la grande majorité fut rapidement exterminée par les SS.
En novembre 1941, il devint un « camp d'éducation par le travail » administré par la Police de Sécurité allemande.
Suite à la visite du SS Reichsführer Heinrich Himmler en novembre 1941, le camp fut transformé en camp de concentration le 7 janvier 1942.
Il évoluera vers un camp d'extermination lors de la Shoah en Pologne. Il y joua un rôle essentiel.
Le personnel se composait de gardes SS et, après 1943, d’auxiliaires ukrainiens.
4. Evolution de la structure du camp.
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Evolution significative de la nouvelle destinaation du camp. En 1940, la superficie totale du camp principal était de 12 hectares, alors qu'en 1944 elle était dix fois plus grande. Outre le camp principal, il y avait environ 100 camps auxiliaires disséminés dans le nord et le centre de la Pologne. Les plus grands camps auxiliaires se trouvaient à Torun et à Elbing.
C’est ainsi qu’il y a ce qu’on appelle « L’ancien camp » et « Le nouveau camp ».
4.1. L’ancien camp.
L’ancien camp comptait huit baraques pour les prisonniers et une kommandantur pour les gardiens SS. Il était bâti sur le même modèle que les autres KZ. À l'entrée du camp se trouvait un panneau indiquant "Waldlager Stutthof" ( « Camp forestier » ). Et non pas le sinistre « Arbeit macht frei ». C’était en fait une affreuse hypocrisie pour masquer la réalité.
4.2. Le nouveau camp.
Le nouveau camp, beaucoup plus vaste, est situé au-delà des jardins. Il est entièrement entouré de barbelés électrifiés. Il comporte 40 blocks de même dimension : 10 pour les ateliers (dans l'ordre d'importance, les selliers, les cordonniers, les tailleurs, les armuriers), 20 pour le logement des détenus, 10 pour les prisonnières juives. Ces 10 blocks sont entourés d'une nouvelle barrière de barbelés électrifiés.
4.3. Le camp spécial.
Le camp spécial est, lui, complètement clos par un mur, surmonté également de barbelés électrifiés. Il comprend 3 blocks, isolés entre eux, où sont logés des déportés.
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5. Inclusion dans la « solution finale ».
Au printemps 1941, il n’y avait qu'une cinquantaine de détenus juifs.
Entre 110 000 et 127 000 personnes furent internées au camp de Stutthof.
Les internés d'origine juive étaient les plus nombreux, environ 50000 personnes, dont des Juifs polonais ainsi que des Juifs venant de camps de travaux forcés des États baltes occupés, que les Allemands avaient évacués lors de l'approche de l'Armée rouge en 1944.
En septembre 1942 un crématoire est construit, puis une chambre à gaz en 1943. Au début de 1944, les détenus seront gazés au moyen de Zyklon B.
En juin 1944, la capacité des chambres à gaz étant insuffisante, des camions à gaz mobiles furent utilisés pour compléter la capacité maximum des chambres à gaz ( 150 personnes par exécution ) en cas de besoin.
On estime que environ 4000 personnes y ont été gazées au Zyklon B.
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5. Crimes commis à Stutthof.
5.1 Les décès.
Des prisonniers de guerre soviétiques, furent exécutés par balles dans le bâtiment du crématoire.
L’épidémie de typhus, due aux mauvaises conditions de vie, éclata pendant l’hiver 1944-1945 ainsi que l’évacuation du camp devant l’approche de l’Armée Rouge, le 25 janvier 1945, contribuent au développement d’une forte mortalité. Sur les 120000 déportés passés par le KL Stutthof, environ 65 000 seraient morts pour ces raisons.
On ne peut les considérer comme des décès de maladie ou accidentels, ces décès sont autant de crimes.
5.1. La savonnerie.
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Un des pires crimes commis par les nazis eu lieu au camp de Stutthof.
Le professeur Rudolf Spanner, officier et "scientifique" SS, était propriétaire d'une petite usine de fabrication de savon près de Dantzig. En 1940, il inventa un procédé pour obtenir du savon à partir de la graisse humaine. Ce "produit" fut appelé R.J.S. - "Reines Judische Fett" - ce qui signifie "Pure graisse juive".
Des centaines de prisonniers furent ainsi exterminés pour la "production" de savon.
A la libération les troupes alliées trouvèrent des dizaines de corps dans les salles de fabrication du savon.
6. Travaux forcés.
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Certains prisonniers étaient affectés à des entreprises appartenant à la SS, comme les Usines d’équipement allemand (DAW), situées à proximité. D’autres étaient envoyés dans des briqueteries locales, des industries privées, les ateliers du camp, ou encore aux travaux agricoles.
En 1944, une usine d’avions Focke-Wulff fut construite à Stutthof.
7. L’évacuation du camp.
L’évacuation des prisonniers commença fin janvier 1945. Elle avait été préparée à partir d’octobre 1944.
Au moment du départ définitif, on comptait près de 50000 prisonniers, en majorité des Juifs.
Depuis les sous-camps, 5000 détenus furent dirigés vers la côte de la Baltique, contraints à finir leur marche dans la mer, où ils furent abattus à la mitrailleuse.
Les autres prisonniers, emmenés à l’est de l’Allemagne, furent interrompus par l’avancée des Soviétiques. Les Allemands forcèrent les survivants à retourner à Stutthof. Dans des conditions hivernales rigoureuses, traités sauvagement par les gardes SS, ils furent plusieurs milliers à trouver la mort durant cette marche.
L’afflux de déportés, pour certains inaptes, pousse les responsables du camp à mettre en place une chambre à gaz dans un wagon désaffecté, pour éliminer rapidement les détenus les plus faibles.Les prisonniers inaptes sont exécutés le long des routes.
On estime que plus de 25 000 déportés moururent pendant l’évacuation de Stutthof et des sous-camps, soit un sur deux.
8. La libération.
L'Armée Rouge a libéré le camp et 385 prisonniers le 9 mai 1945. Ces derniers s'étaient cachés pour éviter l'évacuation finale. Ils furent de précieux témoins pour les procès qui eurent lieu par après.
Le mémorial actuel comprend un immense monument situé sur le terrain ainsi qu'une série de bâtiments d'origine, dont certains abritent de vastes expositions. L'emplacement du camp est quelque peu inhabituel. Il est proche de la mer Baltique, qui est une attraction touristique majeure, en particulier en été.
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