LE VOL NOIR DES CORBEAUX……….
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1. L’image du corbeau dans le Chant des Partisans.
« Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines?
Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu´on enchaîne?
Ohé, partisans, ouvriers et paysans, c´est l´alarme.
Ce soir l´ennemi connaîtra le prix du sang et les larmes. »
L’utilisation du corbeau n’est pas une exclusivité. L’image du corbeau est souvent utilisée dans les poèmes, les chansons, décrivant un contexte de guerre.
Ici, dans Le Chant des Partisans, le « vol noir des corbeaux » est une image faisant allusion aux avions allemands ayant la maîtrise du ciel et bombardant le pays.
L’adjectif « noir », lui, évoque l’uniforme des SS mais aussi l’uniforme des miliciens. Ou, chez nous, des « Gardes Wallonnes » qui étaient surnommés par les liégeois « les neûres biesses ».
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2. Usages divers du mot « corbeau ».
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Le mot « corbeau », depuis la guerre, incarne aussi la délation, le mensonge, la diffusion de mauvaises nouvelles. Les « corbeaux », ce sont les dénonciateurs, les traîtres qui se sont alliés à l’ennemi, les diffuseurs d’informations démoralisantes...
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Les « corbeaux », ce sont aussi tous ceux qui tirent profit de la situation : les accapareurs…
Dans Le Chant des Partisans, la référence aux corbeaux est célèbre. C’est quasiment sa marque de fabrique.
3. Le Chant des Partisans n’a pas innové.
La référence aux « corbeaux », dans le contexte de guerre, n’est pas neuve. On la trouve dans d’autres poèmes, aussi percutants, qui n’ont pas connu le succès d’estime du Chant des Partisans. Mais qui méritent néanmoins d’être tirés de l’oubli.
Tel le poème « Je voudrais voir les gens qui poussent à la guerre sur un champ de bataille » de François PONSARD ( 1814 – 1867 ). Texte injustement attribué par certains à André PONSARD.
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François PONSARD, fut élu à l’Académie française le 22 mars 1855 et reçu le 4 décembre 1856.
Je voudrais voir les gens qui poussent à la guerre,
Sur un champ de bataille, à l’heure où les corbeaux
Crèvent à coup de becs et mettent en lambeaux
Tous ces yeux et ces cœurs qui s’enflammaient naguère.
*****
Tandis que flotte au loin le drapeau triomphant,
Et que parmi ceux-là qui gisent dans la plaine,
Les doigts crispés, la bouche ouverte et sans haleine,
L’un reconnaît son frère et l’autre son enfant.
*****
Oh ! Je voudrais les voir, lorsque dans la mêlée
La gueule des canons crache à pleine volée,
Des paquets de mitraille au nez des combattants.
*****
Les voir tous ces gens-là prêcher leurs théories
Devant ces fronts troués, ces poitrines meurtries
D’où la mort a chassé des âmes de vingt ans.
Et, comme en écho, ce poème de Lucien JACQUES
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« Maudis les corbeaux de malheur qui chantaient la guerre »
- Maudis les corbeaux de malheur qui chantaient la guerre »
... Un vieil homme pleure dans sa vigne.
Il avait deux gars. - Ils sont morts,
Morts à vingt ans et de la guerre
Plus de joie pour lui seul l’esseulé ...
*****
Vide le nid et ses petits tués
Pendant le temps qu’il répétait
Tous ces mots creux mais bien sonores :
Gloire, tenacité et autres fariboles.
*****
C’est ton tourment, ces mots impies
Que des bavards perchés au loin
T’avaient soufflés
C’est du poison dans ton vieux coeur.
*****
Tes gars sont morts ! - Pleure sur eux.
Pleure sur toi et plains leur mère
Et puis maudis... maudis... maudis
Les corbeaux de malheur qui chantaient la guerre.
Lucien Jacques (La pâque dans la grange)
4. Curieux destin du poème de François PONSARD.
Je disais « en écho ». Lucien JACQUES a-t-il été influencé ? A-t-il repris ce slogan en toute connaissance de cause ?
Rien n’est impossible mais rien ne peut non plus étayer cette proposition.
Le recueil La Pâque dans la grange date de 1924 donc longtemps après le décès de François PONSARD.
Ce qui est certain, en revanche, c’est que le poème de PONSARD fut repris, presque comme flambeau, par une organisation pacifiste anarchisante la Ligue Internationale d’action pacifiste et sociale et amis de La Patrie Humaine.
La Patrie Humaine fut un journal publié entre 1931 et 1939.
Etrange destin de François PONSARD, mis en exergue comme militant. Lui qui fut un bon et brave bourgeois, digne représentant de la France ds années 1850. Lui qui fut aussi célèbre par des citations aussi sentencieuses que « Lorsque les bornes sont franchies, il n’y a plus de limites »