Que fut réellement le Mime MARCEAU ?
Un héros de la Seconde Guerre mondiale
/image%2F2782635%2F20230824%2Fob_e02090_marcel-marceau-1260x710.png)
1. Introduction.
/image%2F2782635%2F20230824%2Fob_1ee8ee_timbre-marcel-marceau.jpg)
Le 20 mars 2023, la poste française a émis un timbre pour les lettres internationales, dédié au mime Marceau, à 700000 exemplaires.
« Centenaire de la naissance du mime Marcel Marceau : Avec son corps pour unique instrument, Marcel Marceau (1923-2007) a porté l’art du mime sur les scènes du monde entier, imposant un langage universel. Celui qui savait ‘’ rendre visible l’invisible’’ a donné vie à des personnages qui, sans dire un mot, expriment la vie comme elle est, avec ses combats, ses espérances, ses rêves ».
Une autobiographie inédite du mime Marcel Marceau vient de sortir, le 5 avril 2023, à l’occasion du centenaire de sa naissance : Histoire de ma vie, de 1923 jusqu’en 1952, chez Actes Sud, une publication composée par ses deux filles, Aurélia et Camille.
Marcel MARCEAU, avait écrit en secret ses mémoires, de l’enfance à la construction de Bip, son alter ego. Sur fond de guerre, son récit de jeunesse très marqué par la mort de son père est dévoilé par ses filles.
« Marcel MARCEAU », dit le mime Marceau, est le nom de scène de Marcel MANGEL.
Voilà déjà une information que tout le monde ne connaît pas. Ce que l’on connaît encore moins, c’est que « Marcel MARCEAU » fut d’abord son pseudonyme dans la Résistance.
2. Son enfance.
Né le 22 mars 1923 à Strasbourg dans une famille juive, il est le second fils de Charles Mangel, un boucher casher qui aurait aimé être chanteur, et d'Anna Werzberg, une mère passionnée par les livres. Ils sont d’origine juive polonaise.
Le premier grand choc de sa vie fut l'éclatement de la guerre et l'exode, quand il doit quitter Strasbourg. Sa famille est évacuée comme le reste de la population strasbourgeoise au début de la Seconde Guerre mondiale. Ils s’installent d’abord à Chancelade puis à Périgueux, et en 1941, à Limoges, une ville où il passera l'essentiel de son adolescence.
Il y poursuit ses études au Lycée Gay-Lussac. Le proviseur du lycée Gay-Lussac, Joseph Storck, un Juste parmi les nations, protège les élèves juifs.
Parallèlement, il intègre l’école des arts décoratifs de Limoges où il s'exerce à la céramique.
3. La Résistance.
Marcel Marceau a rejoint la résistance entre 1942 et 1944, sous l'influence de son frère Simon et de son cousin, Georges Loinger.
Il choisira son nom de résistant, « MARCEAU », en hommage à un poème de Victor Hugo (Les Châtiments : "Joubert sur l'Adige/ Marceau sur le Rhin"). Ce nom le suivra toute sa vie.
Faussaire de génie, il copiera et imitera des papiers d'identité pour que ses camarades entrés en résistance puissent circuler.
/image%2F2782635%2F20230824%2Fob_c9b583_039-chateau-chervix-chateau-de-montint.jpeg)
Marcel Mangel devient moniteur de théâtre Montintin. Ce château fut un lieu d’hospitalité pour une centaine d’enfants juifs, menacés par les nazis. Marcel contribua ainsi à protéger ces enfants, dont beaucoup étaient orphelins.
Outre les cours de théâtre qu’il leur prodiguait, il utilisa régulièrement ses talents de comédien pour rassurer les enfants, confrontés à des situations absolument effrayantes. Il leur permettait ainsi de rire et de dédramatiser les moments de tension
Il participa également à la fuite de plusieurs dizaines d’enfants vers la frontière Suisse, à l’aide de son cousin germain, Georges Loinger, également grand résistant. Un millier d'enfants juifs ont ainsi été sauvés entre fin 1942 et 1944.
Pour ce faire, il a utilisé ses talents d’acteur et de mime. Par exemple, il s’est fait passer pour un chef scout et a conduit un groupe d’enfants à travers les forêts jusqu’à la frontière. Marcel mima pour les garder silencieux pendant le périlleux voyage et les enfants se sentaient à l’aise. Une autre fois, en rencontrant un groupe de soldats allemands, il a prétendu être membre de l’armée française et a exigé qu’ils le relâchent.
En 1944, Marcel quitta la ville et s’engagea dans l’armée du général De Lattre. Un volet méconnu de sa biographie. Il devint officier de liaison pour la troisième armée du général Patton.
A la fin de la guerre, il se fera connaître non pas comme un résistant, mais comme un artiste intemporel…
4. Le traumatisme.
En 1944, son père a été capturé par la Gestapo dans la boucherie où il travaillait à Limoges. Il est déporté à Auschwitz, où il mourut peu de temps après. Il fut gazé dès son arrivée. Marcel Marceau ne le saura que plus tard.
C'est sans doute ce qui a construit la profondeur de l'artiste qu'il est devenu et pourquoi il a touché autant le public.
Il a dit lui-même : « Dans mes mimodrames et dans mes pantomimes au théâtre, je peux construire un monde tel que je voudrais qu’il soit, montrer la déchirure, le mal, en ne montrant pas l’abandon mais un cri d’espoir. Je crois à la rédemption humaine à travers le théâtre ».
Marcel Marceau est décédé le 22 septembre 2007 à Cahors. Il est inhumé à Paris au cimetière du Père-Lachaise (division 21).
/image%2F2782635%2F20230824%2Fob_1cbdf6_marcel-marceau-1974.jpg)
5. Ses décorations :
Officier de la Légion d'honneur
Grand officier de l'ordre national du Mérite
Chevalier de l'ordre des Palmes académiques
Commandeur de l'ordre des Arts et des Lettres
En 2001, la Médaille Raoul Wallenberg, au nom du Juste parmi les nations qui a sauvé des milliers de Juifs d’une mort certaine pendant la Shoah. Il l'a reçue avec ces mots : «Ce que j'ai fait humblement n'était rien en regard des héros qui sont morts face aux plus grands dangers. »
6. Un film, contestable et contesté.
/image%2F2782635%2F20230824%2Fob_3a46ff_resistance-still-1-e1585076528350-640x.jpg)
Le long métrage multinational « Resistance de Jonathan Jakubowicz, sorti en 2020, revient principalement sur les années de Marcel Marceau dans la Résistance. Il y est incarné par l'acteur américain Jesse Eisenberg.
Le film, disponible en streaming et sur demande en Amérique du nord depuis le 27 mars, amplifie exagérément la réalité à des fins dramatiques.
MARCEAU n’a sûrement pas rencontré en face à face Klaus Barbie. Et il est impossible qu’il ait utilisé ses « pouvoirs de cirque » pour envoyer une boule de feu sur les gardes de la Gestapo en un seul souffle, permettant ainsi à des gens de s’évader d’un camion de la police !
Certes l’histoire sous-jacente et en particulier les passages de la frontière en Suisse sont vraies mais travestir la vérité dans un but purement esthétique est une faute. C’est du pain bénit pour les négationnistes !
Ce film, en rendant compte des faits de gloire de Marcel Marceau, abuse des surenchères grandiloquentes.
Dans le journal québécois La Presse, on peut lire une critique négative :
« Même si l’on souscrit d’emblée au devoir de mémoire [...] il est difficile de passer par-dessus les carences du scénario et les traits parfois grossiers avec lesquels certains personnages ont été dessinés… »
Les héritiers de Marcel Marceau se sont déclarés « indignés » que le film ait été réalisé sans les consulter.