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awans-memoire-et-vigilance.over-blog.com

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Site relatif au devoir de mémoire. Concerne la FNC, la FNAPG et la CNPPA pour AWANS, BIERSET. Concerne les combattants, les résistants, les prisonniers, la guerre, l'armistice, la libération. Reportages sur les commémorations, les Monuments aux Morts, la Fête Nationale. Discours 11 novembre, 21 juillet et autres.


SIGMARINGEN: VICHY en terre allemande

Publié le 18 Juillet 2023, 17:14pm

Sigmaringen

Vichy en terre nazie

Le crépuscule des Collabos français.

1.Chronologie des derniers moments de VICHY.

Le 10 juillet 1940, l’histoire du gouvernement de VICHY commence dans une salle d'opéra, à Vichy.

357 députés et 212 sénateurs y accordent les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. De ce fait, le gouvernement de Vichy fut le gouvernement légal de la France. La France cessa de s'appeler « République française » pour devenir « Etat fançais ».

Quatre ans plus tard, ce régime est à l’agonie. Juin 1944 : les Alliés ont débarqué en France et sont parvenus à progresser sur tout le territoire. Dix jours plus tôt, c’était en Provence que les adversaires du Reich avaient ouvert un second front, avant de progresser rapidement vers le nord.

Depuis le 2 juin 1944, un gouvernement est opposé à celui de Vichy: le « Gouvernement provisoire de la République française » dirigé par de Gaulle.

Paris, la capitale, est libérée le 25 août.

Les Allemands ne peuvent admettre de laisser aux gaullistes et aux communistes la légitimité du pouvoir. Von Ribbentrop, ministre des Affaires étrangères du Reich, veut maintenir la fiction du seul gouvernement légal de Vichy.

2. Plan de sauvegarde.

L’Allemagne décide de conserver un « gouvernement français », en espérant stabiliser le front dans l’Est de la France avant d’éventuellement enclencher une reconquête du territoire.

Dans le cadre de ce plan de secours, Pétain et ses sbires sont sommés de se rendre en zone nord. Pétain et Laval, sentant le vent tourner, refusent désormais d’intervenir dans les affaires publiques.

Très contrariés, les Allemands menacent de bombarder Vichy puis décident, finalement, d’emmener de force les dirigeants de l’État français au château de Morvillars (à côté de Belfort) ; puis dans le château de Sigmaringen (situé dans l’actuel Land du Bade-Wurtemberg), à partir du mois de septembre 1944.

L’entourage de pétain donna à son départ des allures de bousculade afin de donner l’image d’un prisonnier malmené et quelque peu rudoyé, mais c’était une mascarade ourdie par son état major pour présenter un peu de dignité. Mais l'Allemagne considère que Pétain peut servir dans le cas où elel parviendrait à maintenir l'occupation d'une partie du territoire français face aux Alliés.

Le Maréchal, qui avait déclaré – pour condamner de Gaulle- que « le devoir du gouvernement est, quoi qu’il arrive, de rester dans le pays », prend la route de l’Allemagne. Pierre Laval le rejoint un jour plus tard. Prudent et rapace, Laval avait amené avec lui des centaines de paquets de Lucky Strike, Balto, Bastos et Gauloises et vingt millions de francs prélevés sur les fonds secrets du gouvernement.

3. Le régime de Vichy en exil ( La Commission gouvernementale de Sigmaringen )

Se considérant comme prisonniers, Pétain et Laval décident de cesser leurs fonctions et ne reconnaissent pas la « Commission gouvernementale de Sigmaringen ».

Présidée par le délégué général Fernand de Brinon, celle-ci a pour but de perpétuer le régime vichyste en exil. Elle est composée de Joseph Darnand, secrétaire d’Etat à l’Intérieur, Marcel Déat, ministre du Travail, Eugène Bridoux, commissaire aux prisonniers de guerre, et Jean Luchaire, commissaire à l’Information. Ces ministres sont appelés les « actifs », par opposition aux « passifs », qui se tiennent à l’écart de ses décisions.

Des dizaines de ministres et de hauts fonctionnaires emménagent aussi au château.

Pour maintenir cette fiction, le château de Sigmaringen reçoit le statut d’extraterritorialité et se mue en enclave française (au sommet de laquelle flotte le drapeau tricolore). La grande tragi-comédie de Sigmaringen peut commencer. Le statut d’extraterritorialité enlevait à tous ses résidents la condition de prisonniers.

Les visiteurs étaient obligés de présenter une pièce d’identité, puisqu’ils pénètraient en territoire français. Deux ambassades, l'une pour l'Allemagne, l'autre pour le Japon, ainsi qu'un consulat italien, apportent une caution diplomatique. Ce « gouvernement de Sigmaringen » va durer jusqu'en avril 1945.

Dans un huis clos étouffant et n’ayant rien d’autre à faire, les collabos vont régler leurs comptes. Ils vont passer leur temps à se dénigrer. Pendant 7 mois et 22 jours, loin du chaos de la guerre, va se jouer un mélodrame dans un décor d’opérette et une atmosphère de désenchantement.

Contre toute vraisemblance, les collaborationnistes ont cru jusqu’au bout à la possible victoire de l’Allemagne.

L'activité de la Commission tourne à vide, ses membres n'ayant pratiquement autorité sur rien ni personne parmi les Français d'Allemagne. Déat est un ministre du Travail sans travailleurs; le général Bridoux un ministre sans autorité sur les prisonniers de guerre français ; Jean Luchaire, à l'Information, veille sur un journal et une radio sans véritables lecteurs ni auditeurs ; Joseph Darnand, secrétaire d'Etat à l'Intérieur, voit sa milice passée en Allemagne se dissoudre peu à peu. Ferdinand de Brinon est un président qui ne coordonne rien, chacun des membres de la Commission restant très jaloux de ses prérogatives.

On voit même les ministres s’empoigner pour de lamentables questions de préséance dans les escaliers ou l’ascenseur et leurs femmes dérober les couverts.

4. Une drôle de « vie de chateau ».

En plus des dirigeants, se trouvent, logés dans quelques habitations de la ville, près d’un millier de collaborateurs français. Ces réfugiés s’entassent dans les auberges et dans la gare.

Face au succès final des Alliés, le gouvernement de Sigmaringen doit toutefois être dissous, en avril 1945.

Impitoyable et cynique, Céline décrit la situation lors de la publication d'un de ses romans «D'un château l'autre»:

« Croyez-moi, ce n'est pas par vocation que je me suis retrouvé à Sigmaringen. Mais on voulait m'étriper à Paris parce que je représentais l'antijuif le fasciste, le salaud, l'ordure, le prophète du mal. Donc je me suis retrouvé en compagnie de 1142 condamnés à mort, français, dans un petit bled allemand. Ca valait le coup d'oeil, croyez-moi. Une cellule de 1142 types qui crèvent de rage, cernés par la mort, on ne voit pas ça tous les jours.»

Les 7 000 habitants de Sigmaringen percevaient d’un mauvais oeil l’arrivée de milliers de réfugiés. La grande rue était sillonnée en tous sens par des miliciens bruyants, par une étrange cohue des émigrés errant sans but, misérablement. Sans indulgence, la population considère ces envahisseurs comme gêneurs.

Les privilégiés du château attendent tous les jours le coup de gong pour passer à table. Ils sont servis dans de la vaisselle en argent aux armes des Hohenzollern. Mais le repas consiste le plus souvent en du Stammgericht (pâtée de choux rouges, de raves et de rutabagas).

Seul Pétain a le droit à du fromage gras ! Il avait choisi une suite pas trop grande car moins froide. Les autres occupants du chateau étaient logés en respectant une hiérarchie : Laval à l'étage sous celui de Pétain ; Fernand de Brinon avec sa maîtresse sous l’étage de Laval.

Jacques Doriot fait bande à part. Il s’est replié près du lac de Constance où il trouve l’appui de Josef Bürckel, Gauleiter de la Sarre-Palatinat-Moselle, et d’Heinrich Himmler. Il espère toujours s’imposer comme le führer français. Il possède une radio et un journal. Il ne met jamais les pieds à Sigmaringen mais y envoie Simon Sabiani, politicien et homme fort de Marseille, proche des parrains de la pègre.

 

Marcel Déat , ancien de la SFIO fait aussi défaut, enfui en Italie en 1945 et terré à Turin de 1947 à sa mort, protégé par des religieux.

5. La fin.

Décembre 1944 : l’espoir renaît au château. Le 16 décembre, les Allemands ont lancé une grande contre-offensive dans les Ardennes. C’est l’euphorie, et certains s'imaginent déjà à Paris.

Mais, le 24 janvier 1945, les panzers refluent après de lourdes pertes.

Le 23 février, une autre mauvaise nouvelle tombe : Doriot meurt dans l’attaque de sa voiture. Le 25, Déat, Luchaire, Bonnard, Darnand et Céline assistent à ses funérailles où accourent de toute l’Allemagne ses sympathisants.

Mais Sigmaringen n'est qu'une illusion. La chute du IIIe Reich est imminente et huit mois après leur arrivée tous ces Français vont devoir fuir pour sauver leur peau.

6. La débacle et la justice.

Le 21 avril, l'armée française est arrivée à 60 km de Sigmaringen avec l'ordre de prendre la ville au plus vite.

Le même jour, les troupes du GPR (Gouvernement Provisoire de la République française) entrent dans Sigmaringen.

Le 24 avril, Pétain entre en Suisse et demande à regagner la France.

Le 26 avril, il est remis aux autorités françaises.

Laval voit sa demande d'asile temporaire en Suisse refusée et s’exile en Espagne.

À la fin de la guerre, trois des cinq membres de la Commission sont arrêtés, jugés et fusillés :

  • Fernand de Brinon est arrêté par les américains. Il est remis aux autorités françaises et transféré à Paris en mai 1945. Condamné à mort en mars 1947, il est exécuté le 7 avril, sa grâce ayant été refusée par le président de la République Vincent Auriol.

  • Jean Luchaire, réfugié à Merano dans les Alpes italiennes, se rend à la police militaire américaine lors de l'occupation de la ville, mais est laissé libre. Identifié peu après par des agents français de la sécurité militaire américaine, il est incarcéré à Milan durant 6 semaines puis transféré en France à la prison de Fresnes en juillet 1945. Il est condamné à mort le 23 janvier 1946 et fusillé le 22 février 1946, sa grâce ayant été refusée.

  • Joseph Darnand est condamné à mort le 3 octobre 1945 et fusillé au fort de Châtillon, le 10 octobre 1945.

Deux membres parviendront à s'enfuir et mourront en exil :

  • Eugène Bridoux est arrêté par les troupes américaines en mai 1945. Ramené en France, il est interné au fort de Montrouge. Transféré pour raison de santé à l'hôpital du Val-de-Grâce, il s'en échappe et s'enfuit en Espagne où il meurt en 1955. Il avait été condamné à mort par la Haute cour de justice en 1948.

  • Marcel Déat, aidé par des ecclésiastiques italiens, se cache avec son épouse dans la montagne italienne, puis à Gênes et enfin à Turin où il meurt en 1955. Il avait été condamné à mort par contumace en juin 1945.

 

 

7. SIGMARINGEN a inspiré Louis ARAGON.

 

Dans son poème « Les Neiges de Siegmaringen » (avec un « e » comme dans « Sieg Heil ! »), Aragon s’est moqué de ce ramassis terré dans l’enclave prussienne dans l'espoir d'échapper à l'offensive des alliés, dont l'issue ne fait aucun doute, sauf pour eux.

« Je n'ai ni Morand ni Chardonne/

J'ai vu mourir mon Bichelonne/

Où sont mes sbires d'autrefois/

C'est déjà la fin de la farce/

Où ma garde s'est-elle éparse/

Ma cour de nervis et de garces/

Où sont dispersés mes comparses/

Où est Darquier de Pellepoix »...

 


 


 

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