Le pied des tranchées…
Quid ?
/image%2F2782635%2F20230204%2Fob_74795a_le-systeme-des-tranchees.jpg)
Le pied des tranchées ou pied de tranchée (de l'anglais trench foot), est le nom donné à une maladie ulcéro-nécrotique qui s'est fait connaître quand elle s'est répandue dans les tranchées durant la Première Guerre mondiale.
Peu connue des dermatologues, le pied des tranchées (PDT) est une nécrose des extrémités survenant hors période de gel.
/image%2F2782635%2F20230204%2Fob_d45c31_c-est-pied-des-tranchees-l-empecher5e.jpg)
Elle fut décrite pour la première fois au cours de la première guerre mondiale. Cette pathologie est potentiellement mortelle. Elle a été responsable du décès de 75 000 soldats lors de la Première Guerre mondiale.
Contrairement aux gelures qui sont causées par une exposition à une température inférieure au seuil de congélation du plasma (soit −0,52 °C), le pied des tranchées survient à des températures entre 0 et 12 degrés . Il est favorisé par le port prolongé de chaussures serrées et humides dans des conditions de vie précaires.
Conditions de vie précaires. C’est bien comme cela que l’on peut décrire la vie dans les tranchées. Les conditions de vie des soldats y étaient excessivement dures : outre le froid, les rats, les poux, les odeurs pestilentielles et l'absence d'hygiène, l'ennemi le plus redoutable des combattants est la pluie, qui transforme les tranchées en fondrières malgré les caillebotis qui en garnissaient le fond.
/image%2F2782635%2F20230204%2Fob_456426_2cbb8f605d580dccb2985881e199184c.gif)
Maurice GENEVOIX en parle :
« Mes molletières déroulées coulent sur le parquet. Ma capote s'affaisse près d'elles. L'un après l'autre, mottes lourdes, mes souliers tombent... Tout cela fait un tas de boue qui fume à la chaleur du fourneau. Mes chaussettes fument au dossier d'une chaise ; et sur la chaise fument mes deux pieds nus. Mes pieds sont bleus, de ce bleu qu'on voit aux nuages de l'été, les soirs d'orage. Ils deviennent verts comme une chair de noyé. Ils deviennent rouges comme des paquets de viande saignante. Je regarde mes pieds changer de couleur, en buvant un café tiède au goût de caramel trop cuit (...) Mes pieds cramoisis fourmillent de démangeaisons brûlantes. Engelures énormes, ils commencent à bouillir ; à présent j'ai des jambes : mais je n 'ose plus y toucher. (...) Quelle heure est-il ?... Vais-je dormir ?... Mon Dieu, que ces pieds me font mal ! »
/image%2F2782635%2F20230204%2Fob_a40506_severetrenchfoot.jpg)
Un médecin militaire, le Docteur JAVAL, écrit :
« C'était une nouveauté. Personne ne connaissait la question et il fallut beaucoup d'interventions pour introduire dans la nomenclature médico-militaire, cette maladie qui n'y figurait pas en temps de paix. Les hommes atteints de gelure des pieds étaient-ils des malades ou des blessés ? (...) toujours est-il que les pieds gelés arrivaient par centaines et qu'on ne savait plus où les mettre. On fit des classifications et de la statistique, ce qui est le premier souci de la médecine militaire. Puis on décida que les cas graves seraient évacués à l'intérieur et les cas légers soignés dans les ambulances du front comme la mienne. »
Dans La Main coupée, le légionnaire suisse Blaise CENDRARS attribua le pied des tranchées au froid et à l'humidité :
« Jamais Kupka ne se fit porter malade et jamais il ne voulut aller à la visite. Il fut évacué et réformé pour pieds gelés. Je me souviens qu'il a été le premier de chez nous à avoir les pieds gelés, dans les tranchées de Frise où l'on passait la nuit dans l'eau jusqu'au ventre et par des températures de 0°. »
Roland DORGELES, dans une lettre à sa fiancée lui fait cette demande :
« Peux-tu m'envoyer vite, en le faisant bâcler par n'importe qui, avec n'importe quoi, une sorte de sac en gros drap, ou énorme flanelle, quelque chose de très résistant et très chaud, pour mettre mes pieds la nuit, genre sac à pomme de terre »
Louis MAUFRAIS, dans son livre « J’étais médecin dans les tranchées » : se livre :
« Dans la tranchée, nous vivions constamment dans l’humidité, la boue, la neige, et surtout le froid. L’hiver était particulièrement rigoureux. Depuis que j’étais en ligne, à savoir pas loin de huit jours, je ne m’étais pas réchauffé une seule fois. On avait froid au nez, aux oreilles, aux mains… nos pieds enserrés dans des chaussures pleines d’eau macéraient, gonflaient. Il était formellement interdit de se déchausser. Il en résultait des espèces d’engelures qui s’infectaient, et les pieds gelaient. Une affection extrêmement sérieuse, qui me fit évacuer un grand nombre d’hommes, dont certains restèrent estropiés pendant des années. »
Sans doute, les brodequins sont à incriminer: le cuir mouillé ayant tendance naturellement à se resserrer, le pied était comprimé en plus de baigner dans l'humidité et le froid constant. La station debout prolongée,ne favorisant pas un bon retour veineux,aggravait les choses.
/image%2F2782635%2F20230204%2Fob_9dd3f8_case-of-trench-feet-suffered-by-uniden.jpg)
Les soldats furent affectés par d’autres pathologies spécifiques aux tranchées :
- la constipation des tranchées,
- la fièvre des tranchées,
- la diarrhée des tranchées,
- le rhumatisme des tranchées,
- la néphrite des tranchées,
- l'héméralopie des tranchées,
- la main des tranchées.
On parla à nouveau du « pied des tranchées » lors de la seconde guerre mondiale. Là, les tranchées ne sont pas incriminées pusqu’il n’y en eut pas. Mais les soldats se réfugiaient dans des trous d’obus. Les conditions y étaient les mêmes que dans les tranchées.
Il en est question dans le livre « ARDENNES 1944 – Le va-tout d’HITLER », page 105 :
« Dans le froid humide et intense, les hommes souffraient d’hypothermie, du pied des tranchées, de gelures et diverses maladies »