Echos du 11 novembre 1941 dans la Presse clandestine belge.

Le 11 novembre 1941

dans la Presse Clandestine.

Si l'année 1940 fut l'année du coup de massue pour les patriotes, l'année 1941fut l'année où l'on s'enfonça dans la guerre, l'année où la guerre devint réellement mondiale.

L'année aussi où il était encore difficile pour des patriotes qui étaient privés d'informations correctes d'y voir clair.

1941 fut contrastée :

• attaque de l'URSS où, manifestement, l'armée allemande avait le dessus ;

• l’offensive est lancée, en juin 1941, par 150 divisions allemandes appuyées par des forces finlandaises, hongroises et roumaines. Les troupes soviétiques réparties sur toute la largeur d’un front extrêmement vaste sont rapidement percées ;

• le 7 décembre, les japonais attaquent Pearl Harbour, entraînant les Etats-Unis dans la guerre.

• En Afrique, la situation commence à mal tourner pour les armées italiennes qui connaît plusieurs défaites retentissantes amenant les Allemands à leur venir en aide et, donc, à dégarnir d'autres fronts.

• Il y eut la Grève déclenchée à Liège ( Grève des 100000 )

Dans cet état d'esprit, se déroula le 11 novembre. Des appels aux souvenirs de 1918, des encouragements mais peu sinon pas de nouvelles encourageantes.

Voici l'appel lancé par le journal clandestin L'INSOUMIS dont le titre complet était

l'Insoumis. Bulletin humoristique, d'information et de combat contre les mauvais belges

Dans la finale, on constate aussi que ce journal restait fidèle au Roi Léopold III.

11 NOVEMBRE 1941

La date du 11 novembre, jour anniversaire de l'armistice, éveille en nous bien des souvenirs.

Aux anciens combattants de la grande guerre, elle rappelle l'aube du jour qui marqua la fin de l'horrible tragédie à laquelle ils étaient mêlés depuis quatre ans.

Finies les pénibles gardes aux tranchées, avec les factions dans les trous d'obus, les patrouilles dangereuses, les relèves mouvementées; finis les coups de fusils, les rafales de mitrailleuses, les bombardements meurtriers.

Enfin, l'ère d'une vie nouvelle s'ouvrait, pleine de promesses. Trois fois hélas ! A tous nos concitoyens ayant subi l'occupation de 19I4-19I8, elle remémore le terme tant attendu, accueilli avec un enthousiasme délirant, d'une vie toute de privations, de souffrances physiques et morales, d-exactions sous la botte de la soldatesque teutonne.

Que d'espoirs ce jour béni de l'armistice mit dans leur coeur, mais aussi que de désillusions ils ont éprouvées depuis.

Le 11 novembre nous rappelle à tous la sonnerie des cloches commémorant l'annonce de l'armistice; le cortège aux monuments aux morts de la guerre et la visite aux tombes de nos héros, à la pelouse d'honneur au cimetière; le défilé silencieux devant la tombe du Soldat Inconnu, au pied de la colonne majestueuse de la Place du Congrès; enfin le relais des flambeaux venus des villages situés aux confins du pays et amenés, par étapes successives, au chevet de la Dalle Sacrée .

En ce 11 novembre 1941, où la Belgique toujours occupée subit encore la domination du boche abhorré. Domination sans doute moins cruelle qu'en 1914-1918 mais cependant plus effective, plus pénible par la misère plus profonde qu'elle engendre, pensons à la signification de ce Relais que l'on a justement qualifié de "Sacré".

Qu'en ce jour anniversaire de l'armistice de "l'autre guerre " nos pensées émues convergent de tous les coins du Pays comme jadis les flambeaux, vers la Dalle sous laquelle repose l'Illustre Inconnu, symbole de notre résistance héroïque et de notre sacrifice.

Que nos coeurs affermis par les misères de l'occupation actuelle, transmettent de proche en proche, tout comme les flambeaux, vers le Tombeau de l'Inconnu, notre foi inébranlable en la victoire du Droit sur la Force, notre certitude absolue de voir tôt ou tard notre chère Belgique débarrassée du joug d'un oppresseur insupportable, notre confiance en l'avenir d'un monde nouveau et meilleur, notre attachement fidèle au Souverain qui, dans les heures tragiques de mai 1940. su par sa clairvoyance, épargner nos soldats et nos populations civiles d'un carnage épouvantable.

M 35-11

Voici aussi un appel lancé dans ce même journal clandestin :

LE MOT D'ORDRE POUR LE 11 NOVEMBRE

BELGES,

Souvenez-vous de nos morts de I914-I918 et de 1940. Souvenez-vous de nos fusillés de I9I4-I9I8 et de 1940.

FLEURISSEZ LEURS T0MBES.

BELGES. Restez chez vous. N'achetez pas de journaux embochés. Laissez votre place vide au café, au théâtre, au cinéma.

On note quand même un coup d'éclat de la Résistance, à Liège, aux usines d'Ougrée-Maryhaie. Sans que l'on sache de quel groupement il émanait.

Il est conté dans le n° de décembre 1941 de ce même journal :

NOUVELLES DE LIEGE.

Le 11 novembre des inconnus ont hissé nuitamment sur la plus haute cheminée d'Ougrée-Marihaye, des drapeaux belge , anglais et russe.

Ces emblèmes avaient été fixés au paratonnerre dominant cette cheminée; ils y sont restés jusqu'à ce que les fumées, vapeurs et acides aient corrodé et brûlé les tissus.

L'enquête des allemands n'a pas abouti. Ce fait dénote un beau courage de la part des exécutants, car l'escalade d'une pareille cheminée en activité et ce en pleine nuit, constitue déjà une prouesse.

Les boches ont reculé devant les difficultés et n'ont pas fait enlever ces drapeaux.