11 Novembre 1940: la commémoration en Belgique à l'aube de l'occupation.

LA PRESSE CLANDESTINE

ET

LE 11 NOVEMBRE 1940.

11 Novembre 1940 : Jour de travail obligatoire.

Depuis 1922, la Belgique a fait du 11 novembre un jour férié. Les autorités allemandes prennent l’initiative de s'adresser au collège des secrétaires généraux : il faut faire de ce jour férié une journée de travail ordinaire.

Ils donnent donc l'ordre aux autorités belges d’imposer cette mesure particulièrement impopulaire.

Cela devait amener, on s'en doute, dans l'opinion, des réactions diverses ! La Belgique est occupée depuis près de six mois. La population est toujours le choc et la résistance n'est encore qu'à ses premiers balbutiements : une quarantaine de journaux clandestins plutôt bricolés et l'un ou l'autre sabotage.

Le samedi 9 novembre 1940, 400 avocats du barreau de Bruxelles ont, selon leur tradition, défilé en cortège dans le Palais de Justice avant d’aller déposer une gerbe devant le monument érigé à la mémoire de leurs confrères tombés lors de la Première Guerre.

Le dimanche 10 novembre 1940, un cortège spontané s'est formé à la Colonne du Congrès. Les Bruxellois, défiant l’occupant, furent nombreux à v déposer des couronnes de lierre, des bouquets, de simples fleurs.

Certains groupes n’hésitèrent pas à déposer des gerbes ornées de rubans tricolores. La foule se déplaça en famille et le défilé se déroula dans le calme toute la journée.

Les Anciens Combattants n’ont pas hésité à porter ostensiblement leurs décorations. Autour du soldat inconnu, le silence fait place à des clameurs patriotiques mais aussi à des cris d’hostilité à l’occupant. On chante la Brabançonne et on arbore des insignes pro-britanniques.

Les manifestations ne se limitèrent pas à la capitale. Dans plusieurs villes du pays – outre Bruxelles, Anvers, Liège et Verviers- , des tracts et des mots d’ordre clandestins ont circulé.  

Nous allons voir un exemple d'appel ayant circulé dans la Presse Clandestine.

Voici l'appel publié par le journal clandestin La Cravache :

11 NOVEMBRE.

RENDEZ hommage au soldat inconnu le 11 novembre. Si vous devez travailler, passez devant sa tombe entre les heures de midi ou dans la soirée.

Déposez y des fleurs. PORTEZ UN INSIGNE AUX COULEURS BELGES !

PARENTS, ne laissez par vos enfants aller en classe. Le Novembre reste un jour de date pour les Belges. L'histoire ne se change que dans les manuels.

SOYEZ OPTIMISTES - AYEZ COURAGE - SOYEZ CALMES -

Voici, après coup, le compte-rendu que fait un autre journal clandestin, Libération, dans un n° daté du 1° décembre 1940 :

La signification des manifestations du II novembre.

La manifestation de la libération de notre territoire du joug allemand en 1918 a été parfaite. Elle a montré a l'Occupant d'une manière non équivoque les sentiments de la population, tout en ne dépassant pas une juste limite ayant pu entraîner si elle avait été dépassée des ennuis pour tous.

Des Belges de toutes classes dans toutes les localités du Pays ont arboré avec éclat les couleurs nationales, les couleurs alliées et ont clamé leur espoir en une délivrance proche.

Le Boche sait maintenant que pour nous, il est resté le tyran de 1914 et que nous ne le plaçons qu'au rang de pillard d'envergure.

Il est de bons belges qui ont jugé ces manifestations inutiles. Personne ne prétend qu'elles étaient de nature à amener un grand changement dans l'univers mais elles ont permis a tous de voir que des quantités ou plutôt la grande majorité de nos concitoyens ne se laissaient pas aller aux bobards de la Presse occupante.

Nous pouvons vous dire que des réflexions ont été faites par d'opportunistes belges « de l'avenir » qui se rendent compte qu'au jour de la délivrance il ne leur sera pas dressé un arc de triomphe et qu'ils feraient bien de ne pas oublier leur patrie ne fut-ce que par intérêt.

Nous n'en demandons pas plus aux tripoteurs professionnels. D'autre part, chacun en ces jours a dévoilé un peu plus de ses pensées et nous pouvons vous dire que depuis beaucoup d'Autorités qui croyaient a « l'évolution de notre peuple » ont senti qu'il ne fallait pas trop jouer le jeu de la "collaboration".

Le 11 Novembre fut une bonne journée.