Quelques mots sur Jean MAUPOINT
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Dora, Dora,
il est parfois des noms
Dont l’origine nous inquiète
Et que nous répétons
Souvent sans rîmes ni raisons.
Parmi ces noms troublants
Qui circulent dans notre tête
Il en est un sûrement
Dont nous nous souviendrons longtemps.
Dora, Dora,
Est-ce un chien ou un chat?
Est-ce un nom de fleur ou un nom de femme?
Dora, Dora,
Que ça soit ce que ça voudra
Quel plaisir on aura
Quand on quittera Dora!
Si vous êtes parrain
Après la guerre d’une fillette,
Il faudra c’est certain
Lui trouver un nom assez bien :
Choisissez Dorothée,
C’est un nom de grande coquette,
Et comme ça dans l’intimité
Vous pourrez l’appeler
Dora, Dora,
Est-ce un chien ou un chat?
Est-ce un nom de fleur ou un nom de femme?
Dora, Dora,
Que ça soit ce que ça voudra
Quel plaisir on aura
Quand on quittera Dora!
Lorsque vous vous rendrez
Chez un ami faire bombance,
Fatalement vous prendrez
Sur le trottoir un gros pavé,
Votre femme vous dira :
-
Voyons, Henri, c’est de la démence,
— Chérie tu ne comprends pas
Mais à cet ami ça rappellera
Dora, Dora,
Est-ce un chien ou un chat?
Est-ce un nom de fleur ou un nom de femme?
Dora, Dora,
Que ça soit ce que ça voudra
Quel plaisir on aura
Quand on quittera Dora!
Un jour en société
Il se peut que vous disiez même :
— Tous à poil à côté
Maintenant je vais vous désinfecter.
Rajustant son lorgnon,
Une marquise très Louis XVe
Vous dira : mon garçon
"Vous tenez ça de quel salon?"
Dora, Dora,
Est-ce un chien ou un chat?
Est-ce un nom de fleur ou un nom de femme?
Dora, Dora,
Que ça soit ce que ça voudra
Quel plaisir on aura
Quand on quittera Dora!
Quand vous apercevrez
Devant un grand baquet
De pommes de terre
Un cochon s’engraisser,
De suite vous protesterez.
Pour avoir un tel droit
Qu’est-ce que ce cochon
A bien pu faire
Car je connais un endroit
Où il y en aurait au moins pour trois.
Dora, Dora,
Est-ce un chien ou un chat?
Est-ce un nom de fleur ou un nom de femme?
Dora, Dora,
Que ça soit ce que ça voudra
Quel plaisir on aura
Quand on quittera Dora!
Si un soir au logis
Votre femme vous disait :
Pour te plaire je t’ai acheté aujourd’hui
Un beau pyjama bleu et gris.
— Fous-moi le camp avec ça,
Crierez-vous plein de colère,
Car vois-tu ce pyjama.
Ressemble au costume que je portais à
Dora, Dora,
Est-ce un chien ou un chat?
Est-ce un nom de fleur ou un nom de femme?
Dora, Dora,
Que ça soit ce que ça voudra
Quel plaisir on aura
Quand on quittera Dora!
Bientôt quand, sonnera
L’heure de la délivrance
Et qu’enfin on verra finir
Notre vie de forçat,
En attendant le train
Qui nous ramènera en France,
Tous le cœur plein d’entrain
Nous chanterons ce petit refrain :
Dora, Dora,
Est-ce un chien ou un chat?
Est-ce un nom de fleur ou un nom de femme?
Dora, Dora,
Que ça soit ce que ça voudra
Quel plaisir on aura
Quand on quittera Dora!
Jean Maupoint était chansonnier. Juste avant l'occupation nazie, il entrait en scène avec un portrait d'Hitler et, s'adressant au public, se moquait du « grand dictateur » avec des phrases telles que: «Alors qu'est-ce qu'on fait? On le pend ou bien on le cloue? ". Jeu de mots : il parlait du tableau ...
Arrêté pour son action de propagande anti-allemande sur scène par la milice de Vichy en avril 1943, il fut interné au camp de transit de Royallieu à Compiègne puis envoyé à Mauthausen pour échouer à Mittelbau-DORA le 23 novembre 1943.
A DORA, il sera choisi pour un reportage de propagande réalisé par Walter Frentz, photographe attitré de Hitler.
Libéré le 11 avril 1945, il fut rapatrié mais décéda rapidement le 21 août 1945 à l'Hôtel-Dieu de Clermont-Ferrand. Il n'avait que 38 ans.
Il reçut, à titre posthume, la médaille d'or de la Résistance.
On lui doit aussi la Marche du Front ( stalag 122 ) :
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Sur la photo de propagande: il est à gauche.
On lui doit aussi la Marche du Front ( stalag 122 ) :
De tous les coins de France,
Nous sommes arrivés
Ramassés par malchance
Nous voilà prisonniers.
Certains se désespèrent
Et se font des soucis,
Oublions nos misères,
Tous en choeur chantons ceci:
[Refrain]
À Compiègne, à Compiègne,
Dans ce camp partout cerné
De barbelés.
À Compiègne, à Compiègne,
Nous avions pour tout décor
Des miradors
À Compiègne, à Compiègne,
Du matin jusqu’au soir
On vit dans l’espoir.
Aussi le moral est bon,
Car bientôt nous partirons
De Compiègne.
II
Dans ce lieu d'infortune
Jamais nous ne voyons
De blondes ou de brunes
Bah! Nous nous en passons
Mais faute de sirènes
Aux cheveux ondulés
Dans le camp toute la semaine
Nous apercevons les frisés
III
Où sont nos cuisinières
Et leurs mets succulents
L'bifteack aux pommes de terre
De nos petits restaurants
Plus jamais on ne mange
De ces bons petits plats
Mais par contre en échange
On nous sert des rutabagas
IV
Nous buvions tant de choses
Vin, apéros, liqueurs
Qu'nous avions la sirose [sic! Cirrhose]
Tout au moins des aigreurs
Mais là, plus de chopines
De c'gros rouge d'autrefois
Y a qu'à la Boldoflorine
La meilleure tisane pour le foie
V
L'Français qu'aime les combines
Se fit d'la gratte toujours
Au bureau, à l'usine
On grattait comme des sourds
Même à nos ménagères
Nous grattions quelques sous
Maintenant ça ne change guère
Tout' la journée on s'gratte les poux
VI
Tous on couche sur la paille,
L’électeur, le Député,
Le curé avec ses ouailles,
Le pauvre et le banquier,
L'contribuable sans malice
Couche près du percepteur,
L'commissaire de police
Ronfle auprès d'un cambrioleur.
[alt. Près d'un clochard est tout rêveur]
VII
Des hommes au temps naguère
Nous avaient divisés
Mais frères dans la misère
Nous voilà rassemblés
Laissons nos divergences
Et rapp'lons nous après
Qu'il n'y qu'une France
Et qu'avant tout nous sommes français