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Site relatif au devoir de mémoire. Concerne la FNC, la FNAPG et la CNPPA pour AWANS, BIERSET. Concerne les combattants, les résistants, les prisonniers, la guerre, l'armistice, la libération. Reportages sur les commémorations, les Monuments aux Morts, la Fête Nationale. Discours 11 novembre, 21 juillet et autres.


David ROUSSET: Témoin engagé de l'Univers concentrationnaire, sous-estimé.

Publié le 20 Mars 2021, 18:59pm

DAVID ROUSSET

Prisonnier à BUCHENWALD et Grand Témoin.

 

Les ouvrages de David Rousset, très tôt parus après la libération des camps, ont valeur de témoignages. Ils présentent une première analyse, à chaud, du système concentrationnaire nazi. Il agit en observateur, en acteur, et par la suite en enquêteur

 

David Rousset restera dans l’histoire comme un des premiers à avoir analysé et dénoncé le système concentrationnaire, dans toutes ses manifestations au cours du 20e siècle.

 

 

 

1. David ROUSSET avant 1940.

 

David Rousset est un écrivain et militant politique français. Il est né le 18 janvier 1912 à Roanne (Loire) et décédé à Paris le 13 décembre 1997.

 

On peut dire qu’il provenait de la classe moyenne. Ses deux grands-pères étaient pasteurs de l’Église Darbyste. Son père, un ouvrier métallurgiste promu cadre de maîtrise.

 


Après des études de philosophie et lettres à la Sorbonne, il mène une activité politique, journalistique, et d’enseignant :

* voyages en Allemagne et en Tchécoslovaquie entre 1931 et 1936 ;

* d’abord membre des Etudiants socialistes et de la SFIO ;

* se rapproche de Trotski lors du séjour de celui-ci en France en 1934. Ce qui lui vaut l’exclusion de la SFIO en 1935 ;

* en 1936, participe à la fondation du Parti ouvrier internationaliste (POI), affilié à la IV° Internationale ( trotskiste ).

* se consacre, dès lors, à l’action anticolonialiste, en Algérie et au Maroc.

 

En 1938, il devient correspondant des revues américaines "Fortune" et "Time".

 

2. David ROUSSET, Résistant.

 

En 1940, ayant échappé aux arrestations, il participe à la reconstitution du POI. Dans ce cadre, il monte un service de renseignements et crée un Bulletin industriel et commercial.

 

Il entame des négociations, au nom du POI, avec le Conseil national de la Résistance (CNR).

 

Contraint de quitter Nantes pour échapper au STO, il rejoint Brest en 1943.

 

Il était un des responsables du travail antifasciste auprès de soldats de la Wermacht dans la France occupée. A ce titre, il fut l’un des organisateurs du travail en direction des soldats allemands.

 

C’était une mission que s’étaient donnée les trotskistes : approcher les jeunes soldats allemands pour, faisant appel au sentiment d’appartenance à la classe ouvrière, les amener à la désobéissance.

 

Connaissant la langue allemande, David ROUSSET était l’homme tout désigné. Il fait passer un journal clandestin Arbeiter und soldat, (Travailleur et soldat).

 

Ce travail dans l’armée allemande ? Une forme de résistance plus discrète qu’héroïque mais malgré tout très dangereuse.

 

Il paraît que quelques dizaines de ces soldats auraient rejoint la IVe internationale et édité leur propre bulletin.

 

Ce qui est certain, en tout cas, c’est que les militants du POI ont pu envoyer aux Alliés des informations précises sur les voies de passage des sous-marins. Cela, grâce à leurs contacts.

 

David Rousset est arrêté, par un inspecteur français et deux allemands, le 16 octobre 1943, suite à la chute du réseau de Brest.

 

Durant toute une journée, il sera torturé dans les locaux du siège de la GESTAPO. La Direction de la police nationale française se trouvait à la même adresse, rue des Saussaies, dans le VIIIe arrondissement.

 

Interné à Fresnes, il sera déporté à Buchenwald, et, par la suite, transporté vers d’autres camps de concentration nazis.

 

3. David ROUSSET prisonnier politique.

 

La dénomination « Prisonnier Politique » est une appellation belge. Les français parlent plutôt de « Déportés ».

 

Déporté à Buchenwald, il est ensuite puis transféré vers les camps de Porta Westphalica et de Neuengamme, où il travaille dans les mines de sel.

 

Dans les camps, c’est en dissimulant à ses camarades de détention son appartenance trotskyste qu’il arrive à survivre. Même dans les camps, la rancune des staliniens envers les trotskistes était toujours là. En outre, une annexe de la Gestapo fonctionne dans le camp sous le nom de « Section politique » (Politische Abteilung). Elle surveille les activités politiques des prisonniers grâce à un réseau d’espions. Il fallait donc se méfier de tout le monde.

 

Devant la percée des Alliés, il est, une fois de plus, déplacé avec les autres survivants plus au Nord dans une « marche de la mort ».

 

Cette dernière marche de la mort se termina dans le kommando de Woebbelin, près de Schwerin, avec les déportés déplacés du camp de Neuengamme. Le camp de Wöbbelin n'a été en service que 10 semaines entre le 12 février 1945 et le 2 mai 1945. C’est donc un camp peu connu. La plupart des internés y moururent de faim et de maladie, entassés, sans hygiène, sans eau, ne recevant une maigre pitance. Le camp fut libéré le 4 mai 1945 par des soldats britanniques.  

 

Malgré sa santé délabrée, il aida à évacuer les prisonniers affamés du camp de concentration de Woebbelin. On peut le voir sur une photo de presse, servant de guide aux soldats américains, montrant la rangée de cadavres contre le mur d'un bâtiment en briques.

David Rousset accompagnant les alliés...

 

Dans L’Univers Concentrationnaire, David Rousset décrit la situation, apocalyptique, du camp de Wöbbelin lors de la libération du camp :

« À Wöbbelin, il faudra monter la garde des morts avec des gourdins et tuer ceux qui mangent cette chair misérable et fétide des cadavres. Des squelettes étonnants, les yeux vides, marchent en aveugles sur des ordures puantes. Ils s’épaulent à une poutre, la tête tombante, et restent immobiles, muets, une heure, deux heures. Un peu plus tard, le corps s’est affaissé. Le cadavre vivant est devenu un cadavre mort. »

DAVID ROUSSET, à gauche...

Il rentre en France gravement malade. Voici comment son ami, Maurice NADEAU le décrit en 1945 :

« Lorsque la Gestapo l'a emmené, il assumait une allègre corpulence. Comment est-il devenu ce vieil enfant ridé, ce petit tas d'os? Il s'en est tout de même tiré. Le souffle de vie qui l'anime encore lui permettra-t-il de vaincre l'ultime adversaire?»

 

4. David ROUSSET, témoin privilégié.

 

En décembre 1945, janvier et février 1946, il écrit un article en trois parties pour La revue internationale. Il veut faire connaître la réalité des camps et dissiper la confusion qui existe souvent dans l’immédiat après-guerre entre camps de concentration et camps de prisonniers de guerre.

Un an avant le Si c'est un homme de Primo Levi, il publie en 1946 L’Univers concentrationnaire, une des premières descriptions de la société concentrationnaire. Il obtint le Prix Renaudot 1946. Ce livre est considéré comme la première fresque descriptive du système concentrationnaire répressif.


 

Et, il poursuivit, en 1947 par Les Jours de notre Mort, un roman de 800 pages.

 

« Les jours de notre mort » est construit avec la technique du roman. C’est un chef d’oeuvre difficile à comprendre : l’univers qui y est décrit est à la fois hors de proportion avec les réactions normales, habituelles des hommes ordinaires, tout en étant à la fois proche et intime. C’est davantage un récit, vrai, qu’un roman, affabulé. Les faits, les événements, les personnages sont tous authentiques. Pourquoi aurait-il dû inventer alors que la réalité passait tellement la fiction.

 

Dans Les Jours de notre mort, il utilise une distance de ton terriblement efficace:

«Les cadavres rapportent, explique ainsi un déporté de Buchenwald à un arrivant. Ils ont même intérêt à maintenir constante une certaine mortalité. Chaque vide immédiatement comblé signifie un bénéfice. Le nouveau venu apporte toujours un peu de bien, ne serait-ce que les vêtements qu'il a sur lui. Les cadavres de l'Ouest rapportent beaucoup plus que tous les autres. Un mort coûte strictement ses frais d'incinération, soit deux marks. » 

 

 

David Rousset accède alors à la notoriété et quitte le monde des militants ouvriers pour s’intégrer à celui de la littérature politique.

 

En 1949, il publie dans Le Figaro littéraire un appel « aux anciens déportés des camps nazis et à leurs organisations ». Il appelle publiquement les survivants des camps nazis à témoigner de l'existence d'un «univers de camp de concentration» en Union soviétique. 

 

En 1947, il avait pris la défense d’un ouvrage de Viktor Kravchenko publié en anglais en 1946 et traduit en français en 1947, J’ai choisi la liberté. La vérité publique et privée d’un haut fonctionnaire soviétique.

 

Il n’aura de cesse jusqu’à son décès en 1997, de dénoncer tous les systèmes concentrationnaires dans le monde, dans le cadre de la Commission internationale contre le régime concentrationnaire (CICRC) qu’il avait fondée en 1949.

 

Nous n’aborderons pas dans le détail sa carrière politique, assez sinueuse, après la libération : prise de distance avec les trotskistes, création d’un parti, le Rassemmblement démocratique Révolutionnaire qui ne tint qu’un an, l’adhésion au gaullisme de gauche qu’il quitta aussi, le soutien à Mitterand en 1981...

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