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awans-memoire-et-vigilance.over-blog.com

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Site relatif au devoir de mémoire. Concerne la FNC, la FNAPG et la CNPPA pour AWANS, BIERSET. Concerne les combattants, les résistants, les prisonniers, la guerre, l'armistice, la libération. Reportages sur les commémorations, les Monuments aux Morts, la Fête Nationale. Discours 11 novembre, 21 juillet et autres.


Paul ELUARD: "J'écris ton nom, LIBERTE" revanche de l'histoire;

Publié le 7 Août 2019, 17:58pm

LIBERTE

de Paul ELUARD

Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom

 

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom

 

Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J’écris ton nom

 

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l’écho de mon enfance
J’écris ton nom

 

Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J’écris ton nom

 

Sur tous mes chiffons d’azur
Sur l’étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J’écris ton nom

 

Sur les champs sur l’horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J’écris ton nom

 

Sur chaque bouffée d’aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J’écris ton nom

 

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l’orage
Sur la pluie épaisse et fade
J’écris ton nom

 

Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J’écris ton nom

 

Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J’écris ton nom

 

Sur la lampe qui s’allume
Sur la lampe qui s’éteint
Sur mes maisons réunies
J’écris ton nom

 

Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J’écris ton nom

 

Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J’écris ton nom

 

Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J’écris ton nom

 

Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J’écris ton nom

 

Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J’écris ton nom

 

Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J’écris ton nom

Sur l’absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J’écris ton nom

 

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
J’écris ton nom

 

Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté.

 

Paul Eluard

Poésie et vérité 1942 (recueil clandestin)

 

1. Introduction.

 

Voilà certes un beau poème, rédigé en des circonstance difficiles. C'est le poème de la résistance

 

Ce poème ouvre le recueil Poésie et Vérité. Il  révèle un ELUARD infatigable, messager de la lutte et de l'espoir dans une France occupée et divisée. Le texte fut traduit et diffusé à travers toute l'Europe sous le manteau, par radio, par parachutage. A la fin de la guerre les résistants savaient par cœur ces strophes tonitruantes.

 

2. Petite biographie.

 

Le poète Paul ÉLUARD est né le 14 décembre 1895 et mort le 23 octobre 1952 De son vrai nom, Eugène Émile Paul GRINDEL, il choisit le pseudonyme de Paul ÉLUARD, nom de sa grand-mère.

 

Déjà très jeune, il est de santé précaire. En 1912, ayant contracté la tuberculose, il doit interrompre ses études et il séjourne en sanatorium. Là qu'il rencontre une jeune russe qu'il prénomme Gala. Elle deviendra sa première épouse.

 

Survient la guerre de 14-18. Malgré sa santé défaillante, il est mobilisé. Il part comme infirmier militaire sur le front de la Somme. La guerre et les tranchées le marqueront à jamais. Alors, publie ses premiers poèmes, marqués par son adhésion aux idées pacifistes ("Le Devoir et l'Inquiétude", 1917; "Poèmes pour la paix", 1918). 

 

À la fin de l’année 1917, il a été victime d’une attaque au gaz qui lui a provoqué une gangrène dans les bronches. Il a alors dû être évacué et retourner dans un sanatorium à Paris.

 

La guerre finie, il adhère au mouvement Dada, puis au surréalisme avec André Breton. Toute se confond alors avec le mouvement surréaliste dont il est l'un des piliers et aussi l'écrivain le mieux accueilli par la critique traditionnelle. Il fréquente aussi, entre autres, Aragon.

 

Dans l'entre-deux guerre, il adhère au Parti communiste en 1926. Il en est exclu en 1933 comme les autres surréalistes, mais n'en milite pas moins pour une poésie sociale et accessible à tous ("Les Yeux fertiles", 1936 ; "Cours naturel", 1938 ; "Donner à voir", 1939). En 1925, il avait déjà soutenu la révolte des Marocains ;

 

Sur le plan politique, il voyage dans toute l’Europe soumise à des régimes fascisants. En Espagne, il s’insurge au côté de Pablo Picasso contre le franquisme. Il prend position en faveur de l'Espagne républicaine. En 1937, le bombardement de Guernica lui inspira le poème Victoire de Guernica


 

Mobilisé dès septembre 1939 dans l'intendance, après l'armistice (22 juin  1940). il s'installe à Paris avec sa seconde épouse.


 

En janvier 1942, il s’installe près de Vézelay, non loin des maquis. Il s'engage dans la Résistance et publie plusieurs ouvrages dans la clandestinité (parmi lesquels Poésie et Vérité, en 1942, qui comprend le célèbre poème "Liberté" ; "Les Sept Poèmes d'amour et de guerre", en 1943 ; "Les Armes de la douleur", en 1944).

 

Ce poème sera destiné à la résistance intérieure. Les vingt et une strophes de Liberté, publié dans le  premier numéro de la revue Choix, sont parachutées (avec les caisses de munitions) par les avions anglais à des milliers d'exemplaires au‐dessus de la France.

 

En novembre 1943, il est contraint de se réfugier à l’Hôpital psychiatrique de Saint-Alban où étaientv réfugiés de nombreux juifs et résistants.

 

La guerre finie, Eluard et sa seconde épouse multiplient les tournées et les conférences en Europe sur le signe de la paix.

 

Eluard succombe à une crise cardiaque. Il avait 57 ans. Le gouvernement refuse des obsèques nationales. Aragon, Picasso, Cocteau, entres autres, assistent à ses obsèques. 

 

Revanche de l’histoire: aujourd’hui le poème Liberté est un texte d’anthologie ; Il est fréquemment lu, par des enfants, lors des cérémonies aux Monuments aux morts.

3. Quelques remarques

 

Ce texte consacre Eluard comme un des plus grands poètes de langue française.

 

Ce poème, tout en s’inscrivant dans le contexte particulier de la résistance, constitue un éloge général de la liberté: tel est le sens profond de ce texte et qui explique sa célébrité. Ce texte est donc à la fois particulier et général.

 

Comment volonté de résistance et éloge de la liberté peuvent-ils se conjuguer dans un même texte ? Dans un premier temps, ce poème exprime le contexte de la guerre et les idéaux de la Résistance et, dans un second temps, il fait l’éloge de la liberté. Il célèbre la poésie dont cet éloge est porteur.

 

C’est à la fin du poème que l’on trouve les allusions les plus claires à la guerre et à ses menaces: "sur mes refuges détruits", "sur les murs de mon ennui", "sur les marches de la mort".

 

Mais, le fait de finir le poème par le mot "Liberté", c’est ne pas céder à la mort, au malheur, mais tenter de les dépasser par l’espoir de la liberté à retrouver : "Sur la santé revenue", "Sur le risque disparu", "Sur l’espoir sans souvenir".


Mort, solitude, désespoir sont donc présents mais sans aucun registre pathétique : c’est le point de vue de l’avenir, de la liberté qui permet de les voir comme une épreuve provisoire à surmonter.

 

C’est un hymne à la LIBERTE. Dans ce poème, Liberté s’écrit partout : sur tous les supports, sur tous les objets. Elle est mise en valeur par la reprise, à la fin de chaque strophe de la phrase « J’écris ton nom ». Phrase incomplète. Il faut attendre la dernière strophe pour avoir la clé : LIBERTE.

 

 

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