JEUX OLYMPIQUES DE 1920:
Les Jeux de la rancune !

Les débats modernes autour des Jeux ou du Mondial de Football ne sont pas neufs. L'esprit sportif, olympique, invoqué, est souvent loin d’être exempt de calculs politiques. Ainsi les Jeux de 1920 que l'on pourrait qualifier de Jeux de la revanche ou en tout cas Jeux de la rancune.
Les Jeux de 1916 auraient dû avoir lieu à BERLIN. Le CIO avait choisi BERLIN en mai 1912 à l'occasion des Jeux Olympiques de STOCKHOLM.
Lors du déclenchement de la guerre, l'organisation ne s'interrompit pas, au début du moins, car tout le monde pensait que la guerre durerait peu de temps. Plus tard, les Jeux furent finalement annulés.
La première conséquence de la guerre de 14-18 sur le mouvement olympique fut la décision de transférer le siège du CIO. Celui-ci était installé à PARIS depuis sa création, il fut transféré à LAUSANNE, en SUISSE, " à l'abri, en terrain neutre ".
C'est là que le 5 avril 1919, la BELGIQUE, alors surnommée dans le monde entier la « Poor little Belgium » se vit attribuer l’organisation des Jeux Olympiques de 1920, en hommage aux souffrances endurées par les Belges pendant la guerre de 14-18: tout un symbole. La BELGIQUE fut en effet le seul pays quasi complètement occupé durant 4 ans.
Cette édition des Jeux était d'ailleurs pleine de symboles. Le C.I.O. voulait, par cet acte, à prouver que les Jeux pouvaient résister aux guerres et à la barbarie humaine.
En matinée, un service religieux fut célébré à la cathédrale par le cardinal Mercier, archevêque de Malines. Un De profundis en mémoire des athlètes morts pour la patrie fut suivi d’un Te Deum à la gloire des Alliés.
L’après-midi, le roi Albert Ier présida la cérémonie d’ouverture au Stadion olympique. Il y eut un lâcher de pigeons aux couleurs des 29 nations participantes.
Autre symbole, c'est la première fois qu'un athlète prononce le serment olympique. Le texte était le suivant : " Nous jurons que nous nous présentons aux Jeux olympiques en concurrents loyaux, respectueux des règlements qui les régissent et désireux d'y participer dans un esprit chevaleresque pour l'honneur de nos pays et la gloire du sport ".
Autre symbole, cet athlète fut Victor BOIN. Le 14 août 1920, cet escrimeur belge fut désigné comme porte-parole des athlètes. Il reçut la charge de prêter serment en levant la main devant le roi ALBERT. Victor BOIN avait participé précédemment à des Jeux. C'était un engagé volontaire dans l'armée belge en 1915.
Autre symbole: le drapeau olympique créé par Pierre de Coubertin en 1914 qui représente les continents en harmonie. Drapeau aux cinq anneaux entrelacés qui reprennent les couleurs de tous les drapeaux du monde.
Mais que cachaient tous ces symboles ? Le climat était-il aussi serein qu'on voulait bien le faire entendre ? C'est difficile à imaginer que même pas deux ans après l'Armistice, on allait pouvoir faire concourir dans un esprit "olympique" des nations qui s'était aussi cruellement combattues durant quatre ans. D'autant plus que le monde du sport avait payé un lourd tribut aux combats. Ainsi, rien que pour la FRANCE, au moins 400 sportifs de niveau international ont péri sur le front. Chaque pays engagé dans le conflit pouvait sûrement, proportionnellement établir le même décompte.
La désignation de la ville-hôte ne fut d'ailleurs pas aussi évidente qu'on l'a présentée. Dans un premier temps, c'est BUDAPEST qui avait été désigné pour organiser ces Jeux. Mais la HONGRIE avait été l'alliée de l'ALLEMAGNE...et de plus, la HONGRIE était un pays jeune puisque séparé de l'AUTRICHE depuis peu. Tout le monde n'était d'ailleurs pas là lors du choix: les trois membres français, souhaitant décaler les Jeux à 1921, refusèrent d’assister aux votes. Les représentants des pays ayant déclenché le conflit mondial en avaient été exclus.
Tous les pays ne participèrent pas, sans que cela soit de leur volonté. L'ALLEMAGNE, l'AUTRICHE, la HONGRIE, la BULGARIE et la TURQUIE en furent exclus en raison de leur participation à la guerre. "VAE VICTIS" disaient déjà les Romains. C'est la première décision de caractère politique dans l'Histoire de l'olympisme moderne: il y en aura d'autres ! Le CIO épousa purement et simplement la volonté d'humiliation qui guidait alors les pays vainqueurs. Etat d'esprit que l'on paiera chèrement plus tard !
George ORWELL aurait-il raison, lui qui a écrit:
" Pratiqué avec sérieux, le sport n'a rien à voir avec le fair-play. Il déborde de jalousie haineuse, de bestialité, du mépris de toute règle, de plaisir sadique et de violence; en d'autre mots, c'est la guerre, les fusils en moins."
La TCHECOSLOVAQUIE, bien que faisant partie de l'Empire Austro-Hongrois avant 1918, ne subit pas le même sort que la HONGRIE. Le nouvel état était considéré comme « libéré » de l’Empire austro-hongrois.
À l'occasion des Jeux d'ANVERS, l'U.R.S.S. sera aussi écartée. Mais cela sembla faire son affaire puisqu'elle refusa de son propre chef d'y participer jusqu'en 1952.
Le rituel olympique se mit en place avec le serment prêté par les athlètes et les juges et le drapeau aux cinq anneaux entrelacés qui reprend les couleurs de tous les drapeaux du monde.
Mais l'organisation-même des Jeux pâtit de la situation d'après-guerre. Les JO ne furent guère rentables pour la BELGIQUE, le pays n'étant pas en mesure de faire face aux dépenses provoquée par l'événement. Les prix des entrées aux stades flambèrent et les recettes restèrent minimes. Un maximum d'épreuves se concentrèrent autour du stade du BEERSCHOT: les épreuves d'athlétisme, de football, de rugby et de gymnastique. Le stade olympique ne disposait que d'une capacité de 35 000 spectateurs.
