Histoire peu connue des belges :
LES ANCIENS COMBATTANTS CONGOLAIS.

On en parle trop peu, mais, ces combattants Congolais ont changé le cours de l’histoire de la Belgique et du monde ! Ils ont pesé sur le déroulement de la première guerre mondiale.
Lucas CATHERINE, dans son livre Loopgraven in Afrika [1914-1918], écrit ces mots :
"Pour la Belgique, cette guerre se révéla d'une grande importance. Grâce aux soldats congolais, le pays fit le gain de deux nouvelles colonies: le Ruanda et Urundi .... En effet, la Grande Guerre ne se joua pas seulement aux abords de la Somme ou de l'Yser, mais aussi en Afrique".
Nous examinerons cela sous deux aspects : la participation à la guerre en Afrique et la participation en Europe.
1. En Afrique:

En août 1914, quasiment toute l'Afrique est un ensemble de colonies européennes. La République française et le Royaume -Uni s'en sont octroyés la plus grande part. L'Allemagne a dû se contenter d'une partie plus congrue mais néanmoins importante: dans le Sud-Ouest africain, l'actuelle Namibie; le Kamerun (Cameroun) et le Togo; dans l'Afrique orientale, le Tanganyika et le Ruanda-Urundi.
Dès le début de la guerre, les Allemands firent autant de cas de la neutralité du Congo qu'ils ne l'avaient fait de la Belgique: ils attaquent des postes belges sur la rive occidentale du lac Tanganyika. Cela afin d'établir un pont entre leurs colonies orientales et occidentales, notamment pour briser l'axe britannique entre Le Cap et Le Caire.
Pour cela, ils rencontrent un obstacle, le Congo. 17 août 1914, une canonnière allemande du Lac Tanganika attaque la rive du Congo. Le conflit, jusqu’alors limité aux frontières européennes, s’exporte vers l’Afrique. Le cœur du continent africain se trouve déchiré par les puissances coloniales que sont l’Allemagne, l’Angleterre et la Belgique.
La Belgique avait toujours considéré que sa colonie bénéficiait de sa neutralité que celle-ci était automatiquement reportée sur la colonie. Le mot d’ordre du Ministre des colonies était d’ailleurs très clair : on ne montre de l’agressivité envers personne, mais on se défend si on est attaqué. En conséquence, il faut toujours être sur la défensive aux milliers de kilomètres de frontières.
La Force publique du Congo, instituée par Léopold II le 30 octobre 1885, est mobilisée. Elle représente 15 000 combattants. Mais ils sont mal entraînés car ils n'assuraient jusque là que des fonctions de police. Ils reçoivent l'ordre de se réorganiser pour une contre-offensive, et d'envoyer des contingents en renfort aux troupes coloniales britanniques et françaises engagées au Cameroun et en Zambie actuelle.
Dans un premier temps, la Force publique reste sur la défensive. Elle passera à l’attaque en avril 1916. Deux détachements de la Force publique partent à l'assaut de la colonie allemande. Le 28 juillet, le port stratégique de Kigoma, sur le lac Tanganyika, est pris. Tabora, capitale administrative de la colonie - dans le centre-est de la Tanzanie actuelle - tombe le 19 septembre 1916. Les allemands sont faits prisonniers et des alliés prisonniers, libérés.

Parmi d’autres actes glorieux, il faut citer l’intervention de quatre hydravions belges sur le Lac Tanganika. Intégrés à la Force publique, les pilotes belges étrennent une nouvelle tactique : l’attaque aéronavale.
Et aussi, Mahenge: le chef allemand Von LETTOW se rend aux autorités alors que les troupes allemandes se réfugient au Mozambique abandonnant un gros butin de guerre.
Ce sont la puissance de l’économie congolaise et la main d’œuvre congolaise, ouvriers, paysans, soldats, porteurs, qui nous ont assuré la victoire en Afrique. La production dans les mines d’or fut augmentée, pour payer le coût de la guerre et la production des denrées alimentaires, surtout le riz, destinée au ravitaillement des soldats congolais était décuplé dans la région orientale du Congo. Tous ces vivres et équipement furent transportés par trois cents mille porteurs.
2. Europe:
La situation belge est tout-à-fait contrastée par comparaison ce que firent les pays alliés. Beaucoup d’hommes furent mobilisés sur les champs de bataille pour combattre l’armée allemande et ses alliés. Les empires français et britannique ont utilisé leurs colonies comme viviers à soldats. Par exemple, la France fit appel à plus de 135.000 tirailleurs sénégalais et aussi des unités militaires venues d’Algérie, du Maroc et de Tunisie. Pendant la Première Guerre mondiale,
environ 175.000 soldats venant d’Algérie, 60.000 de Tunisie et 37.000 du Maroc sont mobilisés, ainsi que 180.000 originaires d’Afrique noire.
Un siècle après la fin de la Première guerre mondiale, on ne connait toujours pas précisément les noms des quelque 45 000 soldats africains morts ou disparus à Verdun, au Chemin des Dames, aux Dardanelles...
Les Anglais ont aussi largement profité de cette abondante réserve du Commonwealth. Ils ont, pour rappel, mobilisé plus ou moins cinq mille soldats australiens sur le front européen. Ce n'est qu'un exemple ; les indiens furent plus nombreux.
La Force publique du Congo Belge, quant à elle, ne s’engage que sur le front africain. La Belgique hésite de faire venir les soldats congolais sur son sol. La raison est simple. Le Blanc perdrait de son estime et de son respect s’il devait ramper dans la boue à côté du Congolais dit Jules Renkin, le ministre des Colonies. Il fallait aussi éviter de montrer une mauvaise image de la Belgique et des Européens.
Officiellement, il n’y a eu aucun soldat congolais dans l’armée belge. Ils furent néanmoins 32 dans des unités belges sous l’uniforme belge, à combattre à Namur, Anvers et sur le front de l’Yser. C’étaient des civils engagés volontairement dans l’armée grâce à l'arrêté royal du 5 août 1914 qui créa le corps des volontaires congolais (CVC) à Bruxelles.
A Schaerbeek, Square Riga, un monument est érigé en mémoire des troupes des campagnes d’Afrique avec l’effigie d’un soldat de la Force Publique du Congo-Belge. Tous les 11 novembre, la diaspora congolaise se réunit en ce lieu pour rendre hommage aux anciens combattants congolais qui avaient accepté l’ultime sacrifice pour que la Belgique et le monde demeurent libres.
