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awans-memoire-et-vigilance.over-blog.com

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Site relatif au devoir de mémoire. Concerne la FNC, la FNAPG et la CNPPA pour AWANS, BIERSET. Concerne les combattants, les résistants, les prisonniers, la guerre, l'armistice, la libération. Reportages sur les commémorations, les Monuments aux Morts, la Fête Nationale. Discours 11 novembre, 21 juillet et autres.


AWANS: Que rappelle la Rue Jean JAURES ?

Publié le 23 Juin 2018, 17:40pm

 

 

L'assassinat de Jean JAURES...ses suites judiciaires...et une justice bizarre...

Le dernier discours de jean JAURES n'a pas été prononcé le 25 juillet à PARIS, comme c'est souvent dit.

Mais à BRUXELLES, le 29 juillet 1914.

Il n'en existe pas de texte écrit par lui-même. mais son discours a pu être reconstitué grâce à des compte-rendus parus dans les journaux "LE PEUPLE " et "L'INDEPENDANCE BELGE" du 30 juillet.

Des extraits ont aussi été rapportés dans le journal "LE SOIR" du 31 juillet 1914.

Deux jours plus tard, il fut assassiné à PARIS, au Café  du Croissant. par un exalté , Raoul VILLAIN.

 

 Une grande voix pour la paix s'éteignait.

pour mémoire, Raoul VILLAIN avait d'abord penser à tuer le Kaizer lui-même ! Comme c'était évidemment au-delà de ses possibilités, il avait ensuite pensé à exécuter le Ministre français des Finances, Joseph CAILLAUX. 

Il finit par trouver une meilleure cible, bien moins protégée, sinon pas protégée du tout: Jean JAURES.

 

En 1924, les cendres de Jean JAURES furent transférées au Panthéon.

A AWANS, une rue lui a été dédiée.

Jaures.jpg

 

 

"Citoyens, je dirai à mes compatriotes, à mes camarades du parti en France, avec quelle émotion j’ai entendu, moi qui suis dénoncé comme un sans-patrie, avec quelle émotion j’ai entendu acclamer ici, avec le nom de la France, le souvenir de la grande Révolution. (Applaudissements)

Nous ne sommes pas ici cependant pour nous abandonner à ces émotions mais pour mettre en commun, contre le monstrueux péril de la guerre, toutes nos forces de volonté et de raison.

On dirait que les diplomaties ont juré d’affoler les peuples. Hier, vers 4 heures, dans les couloirs de la Chambre, vint une rumeur disant que la guerre allait éclater. La rumeur était fausse, mais elle sortait du fond des inquiétudes unanimes! Aujourd’hui, tandis que nous siégeons au B.S.I., une autre dépêche plus rassurante est arrivée. On nous dit qu’on peut espérer qu’il n’y aurait pas de choc, que l’Autriche avait promis de ne pas annexer la Serbie (Rires), et que moyennant cette promesse, la Russie pourrait attendre

 

On négocie; il paraît qu’on se contentera de prendre à la Serbie un peu de son sang, et non un peu de chair (Rires); nous avons donc un peu de répit pour assurer la paix. Mais à quelle épreuve soumet-on l’Europe! À quelles épreuves les maîtres soumettent les nerfs, la conscience et la raison des hommes!

Quand vingt siècles de christianisme ont passé sur les peuples, quand depuis cent ans ont triomphé les principes des Droits de l’homme, est-il possible que des millions d’hommes puissent, sans savoir pourquoi, sans que les dirigeants le sachent, s’entre-déchirer sans se haïr?

Il me semble, lorsque je vois passer dans nos cités des couples heureux, il me semble voir à côté de l’homme dont le cœur bat, à côté de la femme animée d’un grand amour maternel, la Mort marche, prête à devenir visible! (Longs applaudissements).

Ce qui me navre le plus, c’est l’inintelligence de la diplomatie.(Applaudissements) Regardez les diplomates de l’Autriche-Hongrie, ils viennent d’accomplir un chef d’œuvre: ils ont obscurci toutes les responsabilités autres que la leur. Quelles qu’aient été les folies des autres dirigeants, au Maroc, en Tripolitaine, dans les Balkans, par la brutalité de sa note, avec son mélange de violence et de jésuitisme, la coterie militaire et cléricale de Vienne semble avoir voulu passer au premier plan.(Applaudissements)

Et l’Allemagne du Kaiser, comment pourra-t-elle justifier son attitude de ces derniers jours? Si elle a connu la note austro-hongroise, elle est inexcusable d’avoir pardonné pareille démarche. Et si l’Allemagne officielle n’a pas connu la note autrichienne, que devient la prétendue sagesse gouvernementale (Rires) Quoi! vous avez un contrat qui vous lie et qui vous entraîne à la guerre, et vous ne savez pas ce qui va vous y entraîner! Si c’est la politique des majestés, je me demande si l’anarchie des peuples peut aller plus loin. (Rires et applaudissements)

Si l’on pouvait lire dans le cœur des gouvernants, on ne pourrait y voir si vraiment ils sont contents de ce qu’ils ont fait. Ils voudraient être grands; ils mènent les peuples au bord de l’abîme; mais, au dernier moment, ils hésitent. Ah! le cheval d’Attila qui galopait jadis la tête haute et frappait le sol d’un pied résolu, ah! il est farouche encore, mais il trébuche(Acclamations). Cette hésitation des dirigeants, il faut que nous la mettions à profit pour organiser la paix.

Nous, socialistes  français, notre devoir est simple. Nous n’avons pas à imposer à notre gouvernement une politique de paix. Il la pratique. Moi qui n’ai jamais hésité à assumer sur ma tête la haine de nos chauvins, par ma volonté obstinée, et qui ne faillira jamais, de rapprochement franco-allemand (Acclamations), moi qui ai conquis le droit, en dénonçant ses fautes, de porter témoignage à mon pays, j’ai le droit de dire devant le monde que le gouvernement français veut la paix et travaille au maintien de la paix. (Ovation. Cris: « Vive la France! »)

 

Qu'arriva-t-il à l'assassin de jean JAURES ?

 

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L'Assassinat de Jean JAURES provoqua une grande émotion en FRANCE mais aussi à l'étranger. Probablement à tort, on estimait que le dernier obstacle opposé à la guerre s'était écroulé. Pensée erronée car si grand que fut le rayonnement de JAURES, il n'aurait pu empêcher la guerre d'éclater. Eternel optimiste, il pensait qu'une grève générale à l'échelle européenne aurait pu l'enrayer !

Même certains de ses adversaires furent profondément choqués. Ainsi, ce fut le cas de Maurice BARRES qui l'avait toujours combattu. Le 1° août 1914, Maurice BARRES, porte-parole de la droite nationaliste, fut parmi les premiers à venir se recueillir devant sa dépouille. 

A cette occasion, il remis à la famille une lettre qu'il comptait publier. Voici ce qu'il dit:

" J'aimais votre père. j'ai toujours souffert de devoir être séparé de lui."

Maurice BARRES écrivit aussi ceci:

" Il ne faut pas me demander de haïr JAURES. je le peux pas et, après examen, je ne le dois pas."

Ces paroles et ces écrits ont choqué les amis de Maurice BARRES.

Cela contrastait avec ce qu'avait dit Charles PEGUY ( mais c'était avant l'assassinat ):

" La politique de Convention nationale, c'est JAURES dans une charrette et un roulement de tambour pour couvrir cette grande voix." Autrement dit: " JAURES à la guillotine !"

Le Président du Conseil, René VIVIANI fit imprimer et afficher la déclaration suivante, au nom du Gouvernement:

" Citoyens,

  Un abominable attentat vient d'être commis. Mr. JAURES, le grand orateur qui illustrait la tribune française, a été lâchement assassiné.

  Je me découvre personnellement et au nom de mas collègues devant la tombe si tôt ouverte au républicain socialiste qui a lutté pour de si nobles causes et qui, en ces jours difficiles, a, dans l'intérêt de la paix, soutenu l'action patriotique du gouvernement.

  Dans les graves circonstances que la Patrie traverse, le Gouvernement compte sur le patriotisme de la classe ouvrière, de toute la population pour observer la calme et ne pas ajouter aux émotions publiques par une agitation qui jetterait la capitale dans le désordre.

   L'assassin est arrêté. Il sera châtié. Que tous aient confiance dans la loi et que nous donnions, en ces graves périls, l'exemple du sang-froid et de l'union.

 Pour le Conseil des Ministres,

Le Président du Conseil 

René VIVIANI "

Pauvre VIVIANI ! Il s'était un peu trop avancé en disant faire confiance à la loi. Il ignorait le principe de la séparation des pouvoirs.

En attente de son procès Raoul VILLAIN est incarcéré durant toute la durée de la guerre et même un peu au-delà. Il ne fut jugé que près de cinq ans plus tard. Un record pour une affaire très claire où pratiquement aucune enquête n'avait été nécessaire. Il y avait quasiment flagrant délit.

L'enquête fut menée par le juge d'instruction DRIOUX. Le procès s'ouvrit le 24 mars 1919 devant la Cour d'assises de la Seine. 

On posa au Jury populaire deux questions

1e) VILLAIN est-il coupable d'homicide volontaire sur Jaurès ?

2e) cet homicide a-t-il été commis avec préméditation? ».

Après une courte délibération, par onze voix contre une, le Jury répondit par la négative. Raoul VILLAIN fut acquitté !

Quelle fut l'explication donnée par le Jury ? Elle est aberrante: les jurés l'acquittèrent considérant qu'il était l'auteur d'un crime passionnel commis par amour de la FRANCE !

La partie civile obtint un franc de dommages et intérêts et fut condamnée aux dépens du procès envers l'Etat.

Il y eut, bien sûr des réactions. Citons celle d'Anatole FRANCE qui fit publier une lettre dans -L'HUMANITE ( alors toujours journal socialiste ) dans laquelle il dit:

« Travailleurs, Jaurès a vécu pour vous, il est mort pour vous. Un verdict monstrueux proclame que son assassinat n’est pas un crime. Ce verdict vous met hors la loi, vous et tous ceux qui défendent votre cause. Travailleurs, veillez ! »

Quant à Raoul VILLAIN, il poursuivit une vie chaotique. Quelques années plus tard, il fit dans le trafic de devises. Il se fit pincer, passa devant un tribunal et fut condamné à une amende de cent francs. trafiquer des devises était donc plus grave que d'avoir tué un homme !

Il se fixa dans l'île d'IBIZA. En 1936, il fut fusillé par les anarchistes. On ne sait pas très bien pourquoi...mais les anarchistes ignoraient qu'ils venaient de fusiller l'assassin de Jean JAURES. 

De quoi croire en une justice immanente ?


 

 


 

 

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