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awans-memoire-et-vigilance.over-blog.com

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Site relatif au devoir de mémoire. Concerne la FNC, la FNAPG et la CNPPA pour AWANS, BIERSET. Concerne les combattants, les résistants, les prisonniers, la guerre, l'armistice, la libération. Reportages sur les commémorations, les Monuments aux Morts, la Fête Nationale. Discours 11 novembre, 21 juillet et autres.


2006: Discours du Professeur FRANCKSON. Un testament moral.

Publié le 22 Décembre 2018, 19:14pm

DISCOURS DE MARCEL FRANCKSON SUR LES DANGERS COURUS PAR LA DEMOCRATIE.

 

Vous trouverez, ci-après, la reproduction d’un discours du Professeur de l’ULB Marcel FRANCKSON prononcé le 24 septembre 2006 à BRÛLY- DE – PESCHES.

Ce discours fut prononcé lors d’une commémoration organisée par le groupement de résistance dénommé « GROUPE HOTTON ».

 

On peut aussi considérer qu’il s’agit, en quelque sorte, d’un « testament moral » légué par d’anciens résistants aux générations suivantes.

Le terme « Testament moral » doit ici être pris à la lettre puisque le Professeur FANCKSON est maintenant décédé depuis février 2018.

Il y fait une analyse des dangers qui menacent la démocratie à l’heure actuelle et ébauche ce qui lui semblent être quelques solutions.


 

DISCOURS DU PROFESSEUR MARCEL FRANCKSON.

« Les quelques anciens qui survivent ont tous passé la barre des 80 ans. Leur « espérance » de vie – pour employer le terme des anthropologues – s’exprime statistiquement par un nombre d’un seul chiffre. Le moment n’est donc pas éloigné où le dernier d’entre nous se fera amener à notre monument pour un ultime adieu aux amis disparus.

  Pourquoi les anciens ont-ils tenu plus de soixante ans à se réunir, à discuter entre eux de l’évolution de la société, à parler de leur expérience dans leur entourage, dans les écoles et cénacles ainsi qu’à écrire livres et articles ? La réponse paraît simple : pour cultiver la mémoire. Non tant celle des méthodes utilisées pour combattre l’oppresseur nazi : les techniques en sont devenues obsolètes et n’intéressent plus guère que les férus d’histoire ou des armes. Tout au plus révèlent-elles l’ingéniosité et la volonté opiniâtre des résistants à harceler l’occupant. L’important n’est pas de se souvenir de comment nous avons agi, mais de pourquoi nous l’avons fait. Pourquoi des hommes et des femmes de tous âges et conditions sociales ont-ils accepté le risque majeur d’être capturés, torturés, expédiés dans un bagne létal ou de tomber sous les balles de l’ennemi ?

 Notre motivation était l’antithèse de celle des tueurs actuels se faisant exploser au milieu de foules civiles dans le but de massacrer des inconnus. Leur immolation volontaire témoigne de leur désespérance devant la condition misérable des groupes dont ils sont issus. La recherche de la mort rédemptrice leur est inculquée – sous le masque du patriotisme – par des prédicateurs obscurantistes rêvant d’effacer des siècles de pensées créatives nées à la Renaissance et de replonger le monde dans une subordination absolue à un dogme intangible et castrateur.

 A l’opposé, nous étions mus par l’espoir. L’espoir de voir rétablir le régime de liberté, de tolérance et du respect de l’individu qui vous avait été ravi par l’oppresseur nazi. Nous n’acceptions pas d’être contraints à la disette, soumis à l’arbitraire et traités en sous-hommes par un occupant totalitaire raciste et arrogant. Nos actions étaient ciblées contre l’oppresseur et ses valets.

 L’effondrement du régime nazi puis le développement de la prospérité dans nos pays démocratiques ont endormi la vigilance d’une grande partie de la population, saisie par l’euphorie consommatoire. Des mises en garde lancées il y a un demi siècle avaient sombré dans l’indifférence ; rappelez-vous celle de Winston CHURCHILL : « Un peuple qui oublie son histoire doit s’apprêter à la revivre » ainsi que celle de Bertold BRECHT prédisant la résurgence de la « bête immonde ».

 Certes, dans notre Europe quasi unifiée, pacifique, et délivrée de l’inquiétant voisin stalinien, la menace totalitaire n’émanera plus d’une invasion militaire. Elle ne proviendra pas plus de groupuscules factieux, nostalgiques du nazisme : ces illuminés peuvent commettre des attentats comparables à ceux des terroristes islamistes, mais non de renverser nos institutions démocratiques. Leur nocivité est indirecte : le terrorisme aggrave la psychose sécuritaire obsessionnelle qui se répand dans la population.

 L’extension de cette psychose est liée à la prépondérance des médias. Le petit écran accapare les loisirs jadis consacrés aux contacts et aux discussions entre citoyens et enferme le téléspectateur dans un monde virtuel d’émotivité que ce soit par la publicité dont vivent les chaînes ou le sensationnel des infos. Or, le sang est un bon produit : il augmentait déjà le tirage de la presse écrite ; il affole l’audimat. Des flashes ne lésinant pas sur l’hémoglobine excitent l’émotivité du téléspectateur et inhibent son sens critique ; l’angoisse ainsi créée génère le sentiment de vivre dans une société ne garantissant plus la sécurité publique. Les partis liberticides et racistes furent les premiers à réaliser le bénéfice électoral à tirer de cette angoisse. Devant le succès de leur tactique, les partis démocratiques leur ont emboîté le pas, reléguant au deuxième rang les défis majeurs de l’avenir et de la survie de notre civilisation. Nous attendons de nos hommes politiques qu’ils rompent la spirale de l’angoisse et présentent une analyse socio-économique historique du problème de la sécurité.

 Depuis deux siècles la sécurité a augmenté de manière continue et remarquable : les notables se déplacent sans escorte armée, les bus et les cars ne sont pas arrêtés sur les routes par des bandes de brigands, les meurtres pour vol sur la voie publique sont rares Bien sûr, des quartiers chauds subsistent dans nos villes en expansion où la densité de la population atteint parfois un niveau critique. Reste la petite délinquance entretenue principalement par des jeunes que notre enseignement rend inutilisables sur le marché de l’emploi, abandonnés à l’oisiveté et tentés par tous les gadgets vantés par une publicité omniprésente.

 L’amélioration – à moyen terme – passe par une refonte complète de notre enseignement secondaire et par une orientation volontariste de notre enseignement supérieur vers des branches porteuses d’avenirs, seule politique capable de réduire le chômage et d’attirer les entreprises. A court terme, cette amélioration impose un encadrement des jeunes désoeuvrés et un accroissement de la surveillance de proximité dans le respect de nos libertés démocratiques.

 Imaginer pareil programme sans un financement important entraînant une augmentation des impôts relève du mensonge ou de l’inconscience. Le citoyen doit être mis en face de ses responsabilités.

 Il faudra pour cela vaincre l’individualisme matérialiste forcené et retrouver les voies d’une solidarité et d’une convivialité sans lesquelles nos valeurs démocratiques essentielles se perdraient. A vous, descendants d’œuvrer dans cette perspective. »


 

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